› La santé en librairie
« LA SEXUALITÉ, c’est parfaitement naturel mais pas naturellement parfait », écrit Pascal de Sutter, reprenant le mot de l’un de ses collègues. S’il ne conteste pas l’existence de troubles de la sexualité et le bienfait des techniques d’apprentissage sexologique, puisqu’il est lui-même sexologue, ce professeur de psychologie à l’université de Louvain nous parle des bienfaits de cette activité humaine, même, et surtout, lorsqu’elle n’est ni une performance ni un problème. La sexualité, c’est bon pour la santé, explique-t-il longuement, études à l’appui. Longévité, réduction de la morbidité, amélioration de la qualité de vie, du sommeil, de la peau, des cheveux, sans parler de l’humeur, le bonheur et l’harmonie sexuels n’ont que des avantages, dit-il. Sans parler de la réduction de l’agressivité, donc de la participation à la paix sociale. Ni du caractère peu dispendieux de cette activité, ce qui, somme toute, en période de crise économique, est un avantage important !
Dans le sillage de ses maîtres en « psychologie positive », Christophe André, Martin Seligman ou Mihaly Csikszentmihalyi, l’auteur développe longuement le sens du bonheur, la notion d’optimisme et ses liens avec le sentiment d’harmonie sexuelle : s’il existe probablement une fréquence des contacts sexuels plus favorable qu’une autre, entre 5 et 15 activités sexuelles par mois, estime-t-il, variable évidemment en fonction d’autres paramètres (âge, état physique, etc.), s’il est anormal de n’avoir jamais d’orgasme quand on est une femme, ou régulièrement des troubles de l’érection lorsqu’on est un homme, ce qui compte est la satisfaction ressentie et non la conformation à une norme. Pour nous en convaincre, l’auteur analyse longuement la place des fantasmes et des idées érotiques, la question du désir et de la motivation, des divergences entre hommes et femmes sur le sujet, le rôle de l’estime de soi et de son corps dans l’harmonie sexuelle.
Ainsi, selon Pascal de Sutter, quatre éléments apparaissent déterminants dans l’épanouissement sexuel féminin : aimer la plupart des aspects de sa personnalité, accepter ses défauts physiques, avoir un projet de vie, avoir confiance en soi ! Convaincu que le bonheur a un lien direct et réciproque avec des désirs et pratiques sexuelles harmonieuses, l’auteur explique, dans un chapitre consacré à l’homosexualité, les fluctuations possibles de l’orientation sexuelle au cours de la vie et affirme que celle-ci n’est pas aussi fixe ni exclusive qu’on veut bien le dire parfois. Son dernier chapitre est consacré au vieillissement. Lequel ne serait pas un obstacle à l’épanouissement sexuel. « Il n’est jamais trop tard pour être sexuellement heureux ! », nous dit-il.
Plus tout(e) jeune mais pas vieux(vieille) non plus.
C’est de cette augmentation de « l’espérance de vie sexuelle » que se préoccupe David Elia dans son dernier ouvrage. Le gynécologue analyse avec clarté et sans langue de bois les symptômes et traitement de la ménopause comme de l’andropause, propose quelques explications des mécanismes du désir et du plaisir, des pannes et moyens d’y remédier, et examine les petits et grands tracas de l’âge qui peuvent modifier la vie sexuelle.
« Depuis l’arrivée du Viagra, les hommes se préoccupent un peu plus de savoir pourquoi et comment ils bandent et éjaculent, eux qui n`avaient qu’une vague idée de la physiologie masculine. Comme pour les baby-boomeuses, c’est grâce aux progrès de la médecine que les hommes évoluent et améliorent la connaissance et la compréhension de leur corps », affirme l’auteur. Pour lui, « bénie des dieux », car elle a pu inventer ses codes, imposer de nouvelles normes sexuelles, et peut continuer, pour une partie d’entre elle, au moins, à bénéficier de grands moments de bonheur hédoniste même à un âge avancé, cette génération est très différente de la précédente et doit faire face à des situations finalement inédites. Les baby-boomeuses ont eu plus de partenaires que leurs mères (2 en 1970 pour 4 à 5 en 2006) mais encore beaucoup moins que les hommes. Elles sont aussi moins nombreuses qu’eux à estimer que la sexualité est dissociable de l’amour (20 % des 50-69 ans pour 40 % des hommes). Un baby-boomer sur 2 estime que la sexualité est indispensable à son équilibre contre 1 femme sur 3 de la même génération.
Il n’empêche, la cinquantaine reste un passage difficile, une véritable crise existentielle pour les deux sexes ; peut-être encore plus pour cette génération, prise entre ses enfants jeunes adultes et ses parents vieux et en perte d’autonomie, tenaillée par l’angoisse de la retraite qui s’annonce et la santé qui commence à donner des signes de faiblesse ! « C’est le rôle du médecin que je suis de limiter au minimum, par des traitements efficaces, tous les effets néfastes de la ménopause et de l’andropause (l’insomnie, la fatigue, la déprime, l’inappétence sexuelle) pour leur permettre de se recentrer sur le sens qu’ils veulent donner à cette deuxième partie de leur vie », écrit David Elia, qui ne se cache pas de plaider pour l’entretien de ce que l’on donne à voir de soi, ce corps, véritable miroir social. Même si, affirme Pascal de Sutter, « Être bien dans sa peau n’est pas une question de canon de beauté ».
Pascal de Sutter, « La Sexualité des gens heureux », Les Arènes, 260 pages, 19,90 euros.
Dr David Elia, « Faire durer le plaisir - La sexualité des enfants du baby-boom », Grasset, 310 pages, 19 euros.
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