Sujet tabou, les troubles de l’érection ne sont pas assez pris en charge. La grande majorité des hommes qui en souffrent, soit près de 72 %, n’a jamais consulté un médecin. « Les causes de la dysfonction érectile (DE) sont multiples. L’angoisse de performance et la baisse de libido n’expliquent pas tout. De multiples pathologies, parfois méconnues, peuvent être à l’origine de ces troubles », souligne le Pr Éric Allaire, professeur de chirurgie vasculaire et endovasculaire à Paris, auteur du « Guide de l’impatient - Les maladies de l’érection » (1).
Les fuites caverno-veineuses en sont un bel exemple. De fait, près d’un tiers des hommes présentant une DE sont résistants aux médicaments inducteurs d’érection et, dans ce tiers, la moitié présente des fuites caverno-veineuses. « En France, 900 000 hommes souffrent de cette maladie qui est rarement abordée en faculté de médecine », indique le Pr Allaire. Entre 1 à 2 % des hommes de moins de 25 ans en sont atteints.
Pour expliquer le mécanisme des fuites caverno-veineuses, le Pr Allaire utilise une métaphore : « Le pénis est comme une baignoire : il faut la remplir pour que l’érection se produise. Pour cela, l’eau (le sang) doit arriver par le robinet (les artères) mais ne doit pas s’écouler de la baignoire (les veines bloquées). Si l’eau qui arrive par le robinet s’échappe par la bonde (les veines), la baignoire ne se remplit pas. C’est précisément le cas des patients atteints de fuites caverno-veineuses ».
Microchirurgie et embolisation
Des progrès diagnostics et opératoires permettent de traiter cette maladie fréquente. L’échographie-doppler du pénis et le cavernoscanner avec injection de prostaglandine E1 et de papavérine dans les corps caverneux permettent un diagnostic précis. « Cette injection induit normalement une forte érection. Dans le cas contraire, il révèle une DE organique. L’échographie-doppler permet également d’observer les flux artériels et veineux, et donc, d’établir le diagnostic de fuite veineuse », note le Pr Allaire.
L’innovation est aussi thérapeutique. Il s’agit de l’association de deux techniques effectuées lors d’une même opération : la microchirurgie et l’embolisation. « Il s’agit de neutraliser les fuites actives et les veines qui peuvent devenir la source de nouvelles fuites. L’embolisation permet d’obstruer les veines et la microchirurgie de les ligaturer. Cette technique, encore peu pratiquée, se développe depuis cinq ans en France. Nous avons publié une étude (2) démontrant son efficacité confirmée par échographie-doppler et test pharmacologique », ajoute le Pr Allaire.
Dans son ouvrage, publié le 10 juin, ce chirurgien vasculaire détaille les mécanismes de l’érection, les différentes pathologies responsables de DE et leurs traitements. « Cet ouvrage peut servir de guide au médecin généraliste pour mieux dépister une DE, estime le Pr Allaire. La formation initiale n’est pas assez solide. Pour pallier ce manque, nous proposons un diplôme universitaire de prise en charge des troubles de l’érection, à Paris (Médecine Sorbonne Université). La DE n’est pas une maladie, mais un symptôme comme la fièvre ou la douleur. Il faut en rechercher les causes et poser un diagnostic avant de proposer un éventuel traitement ».
(1) Éditions Bookelis, 15 €, également disponible sur Amazon KDP
(2) E. Allaire et al., European Journal of Vascular Endovascular Surgery, 2020;61:510-517.
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