« TROIS ANS ! Trois ans que Romain, 29 ans n’a plus de rapports sexuels depuis que sa plaque est apparue sur le gland. Il n’ose pas en parler à ses partenaires. Comment les rassurer, leur affirmer que ce n’est pas contagieux ! Son médecin pensait que c’était un champignon mais aucune crème n’en vient à bout. Alors il vit avec ….mais plutôt mal ! ». Cette histoire n’est pas rare raconte le Dr Josiane Parier (1). Les localisations génitales masculines de psoriasis sont fréquentes et elles peuvent révéler cette maladie, notion peu connue des médecins généralistes.
Chez le sujet circoncis, le psoriasis génital est très souvent caractérisé par des plaques érythémateuses et squameuses bien limitées, assez semblables à celles observées sur la peau. En revanche, chez les sujets non circoncis, les plaques ne sont pas squameuses du fait de la macération. Des plaques arrondies uniquement érythémateuses s’étalent sur le gland et sur le feuillet interne du prépuce. Ces atteintes sont le plus souvent non douloureuses et non prurigineuses.
« Les localisations génitales masculines sont souvent associées à des lésions, péri-anales et du pli interfessier. On peut aussi retrouver une atteinte des plis inguinaux, des lésions sur le fourreau de la verge ou sur le scrotum », souligne cette spécialiste.
Comment faire le diagnostic ? Le diagnostic est aisé quand ces lésions s’intègrent dans le tableau classique de cette dermatose qui est une atteinte bilatérale et grossièrement symétrique des zones bastions, à savoir les coudes, les genoux, la région lombosacrée et le cuir chevelu. Les faces antérieures des jambes, les paumes, les plantes, les ongles et l’ombilic sont également souvent touchés. La lésion élémentaire est érythémato-squameuse, arrondie ou ovalaire, légèrement surélevée, aux limites bien nettes. Sur dix patients atteints d’un psoriasis cutané, trois ont des lésions génitales. Ce qui est surprenant c’est que, très souvent, ils n’en parlent pas spontanément. Il faut les interroger et procéder à un examen cutanéo-muqueux total. « Il est très utile de s’aider des réponses du questionnaire de qualité de vie qui apprécie le retentissement de la maladie sur la vie sexuelle. Le patient est moins inhibé pour répondre à cette évaluation. »
Un diagnostic par déduction.
En l’absence de lésions cutanées et en cas d’atteinte des plis, le diagnostic se fait par déduction. « On prescrit pour une durée de quinze jours un traitement antimycosique d’épreuve, de préférence un imidazolé pour éradiquer à la fois les candidas et les dermatophytes. » Si les lésions s’atténuent, on poursuit le traitement pendant un mois. Si elles persistent, on les rattache alors au psoriasis.
En cas de lésion unique, le seul recours diagnostique est la biopsie où l’analyse histologique élimine un lichen plan non érosif, une maladie de Bowen, une balanite à plasmocytes de Zoon, une carcinome épidermoïde in situ, une érythroplasie de Queyrat.
Comment traiter les lésions génitales ? Les corticoïdes locaux de classe 2 sont le traitement de première intention. On préfère les émulsions fluides non grasses aux crèmes. Les applications sont précédées d’un lavage-rincage avec un savon liquide antiseptique à base chlorhexidine. Le traitement est quotidien puis hebdomadaire dès la disparition des lésions. Le traitement d’entretien est maintenu 8 à 9 mois voire plus en cas de récidive rapide après l’arrêt. Il n’y a pas de risque d’atrophie cutanée à ce rythme d’application.
En cas d’inefficacité, on fait appel aux dérivés de la vitamine D en évitant le calcipotriol,un peu irritant dans cette localisation. Enfin, en cas d’échec, on a recours au tacrolimus en topique, en sachant que ce médicament d’exception ne peut être prescrit que sur une ordonnance spécialisée délivrée par un dermatologue. Les traitements systémiques sont réservés aux atteintes sévères et résistantes des plis. Une répercussion importante sur la vie sexuelle peut également faire pencher la balance dans ses indications.
(1) Dermatologue spécialisée dans le psoriasis, service du Pr Bagot, hopital Saint-Louis, Paris et Varenne Saint-Hilaire (94).
Conflits d’intérêt du Dr Josiane Parier : invitations à des congrès pour les laboratoiress fabriquant des biothérapies (Wyeth, Janssen, Abbott), et participation à des présentations pour les Laboratoires Léo.
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