AU FIL DES ANNÉES, la composition des pilules contraceptives a évolué afin d’améliorer leur tolérance tout en maintenant l’objectif principal : rester une méthode efficace. Les contraceptifs estroprogestatifs (COP) ont vu progressivement diminuer leur dosage en éthynil estradiol (EE) de 50? pour les normodosés jusqu’à 15? pour les minidosés, visant ainsi à diminuer les risques thrombo-embolique et artériel. Les progestatifs norstéroïdes qui leur sont associés ont permis cette baisse des doses d’EE en tendant parallèlement, de la première à la troisième génération, vers des profils le moins androgénique possible et de plus en plus antigonadotropes (norgestimate, désogestrel ou gestodène). D’autres progestatifs non norstéroïdes, comme les dérivés prégnane ou ceux de la spironolactone, entrent également dans la composition des COP.
La contraception progestative pure, ne contenant pas d’estrogènes de synthèse, fait essentiellement appel à ce jour aux microprogestatifs qui représentent une alternative intéressante chez les femmes à risque cardio-vasculaire artériel et thrombo-embolique veineux.
Le médecin peut aujourd’hui adapter sa prescription au profil médical de sa patiente sans oublier que « pour être efficace la contraception doit tout d’abord être choisie par la femme (et bien sûr le couple) correctement informée, et qu’elle doit être adaptée à son type de sexualité, bien tolérée et prise en toute confiance. » Un véritable dialogue doit être instauré, surtout lors de la première prescription afin de parer d’éventuels abandons ultérieurs dus à des manques d’information ou des messages mettant la méthode contraceptive en échec. Cette éducation est primordiale tout comme l’éducation à la sexualité en général. La préoccupation de l’ensemble de la profession reste, en effet, la fréquence des interruptions volontaires de grossesses (IVG) dont la courbe demeure identique depuis 1980 avec une prédominance et un accroissement régulier chez les toutes jeunes femmes âgées de 15 à 17 ans. Pour le Dr Letombe « Le problème majeur est celui de la sous information quant aux possibilités contraceptives et de l’accessibilité à une contraception efficace. C’est surtout vrai chez les jeunes, qui utilisant à juste titre les préservatifs pour lutter contre les infections sexuellement transmissibles, se retranchent trop souvent derrière leur fausse sécurité contraceptive. Les adolescents doivent savoir que sexualité va de pair avec contraception, et il est nécessaire de réinstaurer la confiance dans la contraception orale mise à mal ces dernières années, tant chez les jeunes que chez les moins jeunes ».
Veiller à ne pas prendre de risque médical.
La contraception hormonale se doit d’être efficace et bien suivie. Mais, pour être bien suivie, elle doit être bien tolérée tant sur le plan médical que par la patiente.
Toute prescription de contraceptif doit être guidée par les antécédents médicaux et l’histoire personnelle de chaque femme. Si la patiente a des antécédents familiaux de thrombophilie ou personnels de phlébite ou enfin si elle souffre de migraines avec signes neurologiques focaux, l’éthinyl estradiol et donc la COP qui augmente le risque thrombogénique est à écarter au profit d’un microprogestatif.
L’âge de la patiente est une composante importante. Dès 35-40 ans, il est en soi un facteur de risque cardio-vasculaire pour les femmes sous COP. Si la COP est associée à un tabagisme, le risque est multiplié par 13, par 17 pour un diabète, et par 10 pour une hypertension artérielle. L’obésité et le syndrome métabolique ? qui touche environ 20 % des femmes- sont également des facteurs de risque. Ainsi, une femme de 40 ans, fumeuse, a une probabilité 20 fois plus élevée de faire un infarctus du myocarde sous estroprogestatifs qu’une femme jeune. Dans toutes ces situations, les progestatifs seront préférés et, sauf pathologie particulière (ménométrorragies, fibromes, mastodynies bénignes), le choix se porte sur les microprogestatifs. Ils n’interfèrent pas avec l’hémostase, n’ont pas d’effet sur la pression artérielle ni sur le métabolisme lipidique, et n’ont qu’un faible impact sur l’insulinorésistance sans modification du risque vasculaire.
L’efficacité anti-conceptionnelle est le primum movens
Sur le plan physiologique, l’action anti-ovulatoire des estroprogestatifs est gage de leur efficacité. Les microprogestatifs, quant à eux, agissent principalement en modifiant la composition de la glaire cervicale et la réceptivité endométriale. Parmi les trois progestatifs commercialisés (noréthistérone, lévonorgestrel et désogestrel), seul le désogestrel 75 µg a un effet anti-ovulatoire dans 97 % des cas. À cet effet s’associe une estradiolémie qui reste équivalente à celle observée en phase folliculaire.
La limitation des contraintes de prises favorise l’observance.
L’efficacité de la méthode contraceptive est dépendante de l’adhésion de la patiente à son traitement, au jour le jour et au long cours. Des arrêts se produisent durant la première année dans 30 à 50 % des cas et durant les trois premiers mois pour 50 % des adolescentes. Toutes les études montrent qu’à côté de l’efficacité théorique en utilisation optimale observée dans les essais cliniques, généralement excellente, en pratique courante les résultats chutent, passant ainsi au cours des 12 premiers mois d’utilisation pour la contraception estroprogestative de 0,1 à 6-8 grossesses pour 100 femmes, soulignant ainsi l’intérêt de l’observance. « Les oublis de pilules sont plus fréquents qu’on ne le croit : 25 % des femmes ont oublié leur pilule au moins une fois au cours du cycle précédent et 59,4 % l’ont oublié dans les trois mois précédents. Le médecin doit garder ces chiffres à l’esprit, bien informer la patiente et toujours adjoindre une ordonnance pour la pilule du lendemain, notamment chez les adolescents. » La flexibilité de la prise est ainsi très importante. Les estroprogestifs permettent un oubli de 12 heures, tout comme le microprogestatif au désogestrel 75 µg, ce qui n’est pas le cas des autres microprogestatifs, dont l’écart de prise est plus contraignant et ne doit pas excéder 3 heures. La contraception progestative par implant peut être une réponse au problème de l’observance.
Il ne faut pas oublier les bénéfices symptomatiques de la contraception progestative.
En diminuant les fluctuations et les taux d’estrogènes endogènes, les microprogestatifs réalisent un lissage hormonal bénéfique sur le plan symptomatique avec amélioration de la dysphorie prémenstruelle, des migraines, des nausées, des mastodynies, des dèmes, des dysménorrhées et diminution de la prise d’analgésiques.
*Service de gynécologie de l’hôpital Jeanne de France, Lille
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