« Les saignements urinaires, on les considère ». Tel est le slogan que l'Association française d'urologie (AFU) diffuse en ce mois de mai dans sa campagne de sensibilisation au cancer de la vessie menée en collaboration avec l'association de patients Cancer Vessie France.
Si l'opération se veut d'abord grand public, la société savante adresse aussi des messages à destination des médecins. « Que faire face à une hématurie, c'est une question posée très fréquemment, rapporte le Pr Yann Neuzillet, secrétaire général de l'AFU. Pas tant pour l'hématurie macroscopique,pour laquelle les médecins ne tergiversent pas à adresser à l'urologue, pour prise en charge en urgence d'un caillotage vésical ou pour bilan diagnostique rapide fibroscopique, que pour l'hématurie microscopique. Médecins du travail, généralistes, néphrologues, cardiologues, tous les collègues amenés à faire des bandelettes urinaires (BU) sont concernés par ce questionnement. »
Si le risque de cancer de la vessie est de 17 % en cas d'hématurie macroscopique, il varie entre 1 et 3 % en cas d'hématurie microscopique répétée à la BU. Si les trois principaux facteurs de risque sont réunis - âge > 60 ans, sexe masculin, tabagisme -, il s'élève à 3 %, précise l'urologue.
Une écho de l'appareil urinaire
Après avoir confirmé l'hématurie sur plusieurs BU et à la cytologie urinaire, la question est de savoir quels examens prescrire et vers quel spécialiste, urologue ou néphrologue, adresser en priorité. « Il n'y a pas de consensus international, mais l'on peut s'appuyer sur les recommandations américaines qui proposent une conduite à tenir selon les facteurs de risque, explique l'urologue de l'hôpital Foch, à Suresnes. Une échographie de l'appareil urinaire vessie pleine ne fait pas moins bien qu'un uroTDM. Et ce, sans toxicité liée à l’injection d'iode et sans irradiation, et à moindre coût. »
L'échographie est donc largement suffisante en examen de débrouillage, pour voir à la fois les reins et les voies urinaires. Si la conclusion est rassurante, un avis urologique peut être programmé sans urgence pour une cystoscopie. « Si la fibroscopie ne retrouve pas d'anomalie, un avis néphrologique peut être programmé », indique le Pr Neuzillet.
Vigilance chez les femmes
Point particulier : l'hématurie chez les femmes. « Paradoxalement, alors que les femmes sont moins à risque, les hommes fumant davantage et étant plus souvent atteints, les tumeurs sont à l'évidence plus avancées chez elles, rapporte le spécialiste. Il n'y a aucune raison liée au chromosome X. Le diagnostic est plus tardif, car on s'en inquiète moins, les menstruations et les cystites pouvant être incriminées à tort. Les médecins sont aussi responsables du retard à la prise en charge. » Il faut être plus en alerte, bien sûr en cas d'hématurie, mais aussi de cystites à répétition ou de troubles de la miction.
« Quand on sait ce qu'il faut faire, c'est aussi plus facile de sensibiliser les patients, avance le Pr Neuzillet. Un saignement urinaire, ce n'est pas bénin. » Le cancer de la vessie, dont l'incidence est de 13 000 à 20 000 personnes par an, est le deuxième cancer urologique après celui de la prostate, avec quatre fois plus de cas chez l'homme que chez la femme. Quand le cancer est pris à temps, la survie est de 80 % à cinq ans ; s'il est diagnostiqué plus tard, elle n'est plus que de 50 % et s'effondre à 5 % au stade métastatique.
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