vec une prévalence de 14 %, l’hyperactivité vésicale (HAV) non neurologique est un trouble aussi fréquent que la migraine, mais beaucoup moins rapporté par les patients. En cause, les fuites urinaires associées dans 30 % des cas, qui restent un sujet tabou.
Ce syndrome, qui touche quasi autant les hommes que les femmes, est défini par la survenue d’urgenturies, avec ou sans incontinence urinaire, associées le plus souvent à une pollakiurie, parfois une nycturie, en l’absence d’infection urinaire ou de toute autre pathologie évidente.
Un calendrier mictionnel
La tenue d’un calendrier mictionnel sur trois jours, où sont notées les mictions, les sensations, les éventuelles fuites urinaires et prises liquidiennes, permet d’objectiver ce syndrome. La notion d’urgenturie se caractérise par le besoin de courir pour uriner, avec une impossibilité de se retenir d’uriner pendant plus de deux minutes. Si le nombre de mictions dépend des prises hydriques, il ne dépasse pas huit par jours dans des conditions de consommation standard. Plus que des seuils, c’est le ressenti et l’impact du trouble qui importent. La qualité de vie des patients peut être profondément perturbée. Certains patients adaptent leur mode de vie, ce qui peut aller jusqu’à l’isolement social.
Il faut bien sûr éliminer une pathologie sous-jacente, ce qui conduit à réaliser a minima une échographie pelvienne et vésicale, avec une étude systématique du résidu post-mictionnel, et un examen cytobactériologique des urines. Le patient sera adressé à un urologue pour une débitmétrie en cas de dysurie. Une cystoscopie sera indiquée en fonction du contexte, notamment chez un patient ayant un antécédent d’exposition tabagique ou à des carcinogènes urinaires.
Des mesures hygiénodiététiques aux traitements médicamenteux
La prise en charge de l’HAV se fonde dans un premier temps sur des mesures hygiénodiététiques — limitation de la consommation d’irritants vésicaux tels que le café et les sodas, réduction de la consommation de tabac (même si son impact n’est pas prouvé) — et comportementales, avec une reprogrammation mictionnelle. « Apprendre à se retenir, refréner les envies, cette reprogrammation marche particulièrement bien chez les sujets âgés », souligne le Pr Xavier Gamé, l’un des deux coordinateurs du rapport de l’AFU. Si ces mesures ne suffisent pas, une rééducation périnéosphinctérienne peut être proposée. Elle consiste en un réapprentissage du réflexe périnéo-inhibiteur (serrer les fesses suffit à stopper une envie d'uriner). Elle doit être commencée avec un professionnel de santé, puis entretenue à domicile.
À côté du traitement hormonal par voie locale qui peut être efficace chez les femmes ménopausées souffrant d’un syndrome génito-urinaire, il y a deux grands types de médicaments spécifiques de l’HAV : les anticholinergiques et les bêta-3 agonistes, comparables quant à leur efficacité mais dont les profils de tolérance diffèrent. Les premiers peuvent entraîner une sécheresse buccale, des troubles cognitifs, parfois une constipation, effets plus ou moins fréquents selon l’urosélectivité de la molécule. Les seconds ont pour principal effet indésirable une augmentation de la pression artérielle. En pratique, le choix du traitement se fait en fonction du profil de chaque patient.
Le traitement est prescrit pour trois mois, délai nécessaire pour en apprécier l’efficacité, en sachant que les éventuels effets indésirables apparaissent plus rapidement que les bénéfices. L’observance à long terme est médiocre : seuls 26 % des patients poursuivent le traitement jusqu'à 12 mois.
Les thérapies spécifiques des formes réfractaires
Dans les HAV réfractaires à ces approches, soit environ 30 % des patients, trois autres possibilités thérapeutiques existent. La stimulation électrique du nerf tibial, méthode peu contraignante, est réalisée à domicile et efficace dans 50 % des cas. La neuromodulation du nerf sacré consiste en la pose d’une électrode au contact de la racine S3 (sous anesthésie générale) et d’un boîtier (externe pendant la période d’essai puis implanté sous anesthésie locale). Son efficacité est d’environ 70 %, le boîtier est changé tous les cinq ans, bientôt tous les 15 ans. En alternative, chez les patients ayant une incontinence urinaire par urgenturies, les injections intradétrusoriennes de toxine botulinique A répétées tous les six mois permettent à 40 % des patients de retrouver une continence complète, et à 70 % d’être au moins améliorés.
« Quasi tous les patients peuvent être traités, ce qui souligne l’importance de rechercher ce syndrome à l’interrogatoire », conclut le Pr Xavier Gamé.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?