L'Association française d'urologie (AFU) a décidé de faire de l'infertilité masculine un des thèmes majeurs de son 117e congrès français d'urologie qui se tiendra à Paris du 22 au 25 novembre. La société savante y présentera un rapport complet sur le sujet. Cette mise à jour des connaissances destinée à tous les professionnels de santé est très attendue : la dernière synthèse de l'association date de 1984.
Au cours de la période 1973-2018, la concentration de spermatozoïdes à l'échelle mondiale a diminué de 51,6 % et leur nombre total a chuté de 62,3 %. Le déclin de la concentration plasmatique par an a doublé, passant de 1,16 % après 1972 à 2,64 % après 2000. Le problème de l'infertilité masculine s'accélère et est désormais mondial.
« On est face à une possible extinction de l'espèce », s’alarme la Dr Charlotte Methorst, chirurgienne urologue à Saint-Cloud, qui a dirigé la rédaction du rapport de l'AFU. Les raisons sont multiples : modes de vie plus sédentaires, obésité, tabagisme, consommation d'alcool, stress oxydatif, manque de sommeil, pollution, consommation de cannabis, etc.. Certains facteurs comme l'obésité auraient même un effet transgénérationnel.
« Une infertilité sur trois s'explique, entièrement ou en partie, par une infertilité masculine, rappelle la Dr Methorst. Dans un parcours PMA, la fertilité masculine doit être systématiquement évaluée, mais pas seulement avec un spermogramme. » Parmi les causes d'infertilité, la varicocèle, ou varice des testicules, est présente chez 40 % des hommes qui consultent pour infécondité. Détectable par une simple échographie, cette pathologie est relativement facile à traiter par une chirurgie ambulatoire. Des traitements médicaux existent également, mais qui ne doivent pas être entamés sans un examen médical approfondi. « Dans le rapport qui va sortir, il y a des algorithmes décisionnels spécifiques à la fertilité masculine », précise la Dr Methorst.
Novembre, un mois pour lever les tabous
Au-delà du seul problème de la fertilité, c'est toute la santé masculine qui a tendance à être négligée, regrette le Pr Alexandre de la Taille, président de l'AFU et chef du service d'urologie du CHU Henri Mondor (AP-HP). « Les hommes ont trop tendance à associer le médecin à la pathologie : ils ne consultent que quand ils sont malades, résume-t-il. Il faut faire rentrer dans les mœurs l'importance de la prévention en santé masculine. »
À cet effet, l'Association française d'urologie lance, ce mois de novembre 2023, le mois de la santé masculine. Une campagne de communication est en cours pour « briser les tabous » autour des quatre des motifs les plus fréquents de consultation en urologie : les dysfonctionnements érectiles, les cancers du testicule et de la prostate et la gêne urinaire.
Le dépistage du cancer de la prostate en pleine révolution
Les représentants de l'AFU ont d'ailleurs renouvelé leur appel à une amélioration du dépistage du cancer de la prostate, premier cancer masculin avec 50 000 nouveaux cas chaque année en France et environ 8 000 décès. Les connaissances en matière de diagnostic et de dépistage ont beaucoup évolué au cours des dernières années, comme l'explique le Dr Guillaume Ploussard, chirurgien urologique à la clinique La Croix du Sud, à Toulouse, et responsable du sous-comité Prostate de l'AFU : « Il y a encore 15 ans, l'association du toucher rectal et du dosage du PSA était considérée comme le meilleur moyen de sélectionner les patients à risque et à les orienter vers la biopsie, rappelle-t-il. Mais cela nous poussait à réaliser des biopsies à l'aveugle, qui plus est sur des patients qui n'avaient pas de cancer. »
Aujourd'hui, l'introduction de l'IRM permet une meilleure sélection : « avec le PSA et le toucher rectal, une anomalie est détectée chez 15 % des patients, indique le Dr Ploussard. Si on ajoute l'IRM, ce ne sont plus que 7,5 % des patients qui sont adressés à la biopsie. Des données récentes semblent même indiquer que le toucher rectal n'a finalement pas d’intérêt clinique et suggèrent de dépister avec seulement l'IRM et le dosage du PSA ».
L'intégration de l'IRM, coûteuse et gourmande en personnel, serait toutefois mal adaptée à un dépistage de masse généralisé. Aussi le Pr de la Taille suggère la mise en place d'un dépistage sur facteurs de risque, au premier rang desquels les antécédents familiaux de cancers de l'ovaire, du sein, de la prostate et du pancréas, et l'origine afro-caribéenne. « Quand on en parle à nos tutelles, elles ne sont pas très enthousiastes, constate-t-il. Mais depuis la résolution européenne de décembre 2022 qui préconise le renforcement de la détection précoce des cancers, dont le cancer de la prostate par le dépistage, on sait que des fonds européens vont se débloquer en faveur du dépistage », espère-t-il.
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