La vasectomie, longtemps très marginale, gagne du terrain depuis une décennie. C’est ce qui ressort d’une étude EPI-Phare menée sur la période 2010 à 2022. « Le nombre de vasectomies a été multiplié par 15 en 12 ans en France, et depuis 2021 il dépasse le nombre de stérilisations féminines », rapporte ainsi le groupement d’intérêt scientifique en épidémiologie des produits de santé ANSM-Cnam.
Ces résultats décrivent une tendance à rebours de ce qui est observé dans le monde, en particulier dans les pays anglo-saxons où la vasectomie, historiquement très répandue, connaît un déclin (États-Unis, Royaume-Uni ou Australie). Si la vasectomie sort de l’ombre en France, le recours reste néanmoins limité. « La France semble progressivement combler son retard, bien que le nombre de procédures demeure encore inférieur à ceux des pays leaders en matière de contraception masculine définitive », expliquent les auteurs.
Des pistes pour la contraception masculine sont à l’étude, mais l’éventail des méthodes disponibles est restreint, les seules remboursées par l’Assurance-maladie étant les préservatifs (pour les moins de 26 ans) et la vasectomie, autorisée depuis 2001 en France.
Un impact de l’arrêt des implants Essure
À partir des données nationales du système de santé (SNDS), l’étude d’EPI-Phare montre que le nombre de vasectomies a fortement augmenté depuis 2010 en France, passant de 1 940 en 2010 à 30 288 vasectomies en 2022, soit un taux annuel multiplié par 15. Dans le même temps, le nombre de stérilisations féminines (stérilisation tubaire par ligature des trompes de 2010 à 2022, ou pose d’implants avant 2017) a été divisé par deux entre 2013 et 2022 (de 45 138 stérilisations en 2013 à 20 325 en 2022) après une augmentation initiale entre 2010 et 2013.
« En 2022, trois stérilisations masculines ont été pratiquées pour deux stérilisations féminines », lit-on. Pour les auteurs, ce croisement inédit des courbes entre stérilisations masculines et féminines est dû « non seulement à la forte augmentation du nombre de vasectomie en France depuis 2010, mais également à la baisse continue des stérilisations féminines, ceci pouvant en partie s’expliquer par l’arrêt de commercialisation des implants Essure en 2017 ».
Des hommes plus jeunes et plus favorisés
Les hommes ayant recours à la vasectomie étaient en moyenne de plus en plus jeunes entre 2010 et 2022 (de 44 à 41 ans en âge moyen) et semblaient correspondre à des profils de niveaux socio-économiques les plus favorisés. Considérant la population d’hommes de 20 à 70 ans, les Pays de la Loire et la Bretagne sont les régions où les taux de pratique de vasectomie ont été les plus élevés sur les 13 années étudiées. À l’inverse, les taux ont été nettement plus faibles en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Corse et en Île-de-France.
La sûreté des procédures de vasectomie est confirmée avec, dans l’année post-vasectomie, « un recours modéré des hommes aux antalgiques » et un taux bas de complications locales (un homme sur cent) avec des reprises chirurgicales « quasi exceptionnelles ». Quant au taux de recours à l’opération de réversibilité de la vasectomie, la vasovasostomie, il est « particulièrement faible ».
La récente appropriation par les hommes français de cette contraception définitive correspond-elle à un simple rattrapage ou à une tendance de fond ? Seule la poursuite de la surveillance permettra de le déterminer, estiment les auteurs, pour lesquels il sera alors intéressant d’évaluer « l’impact du recours à la vasectomie dans le temps sur l’utilisation des contraceptions féminines réversibles ou définitives, et de mettre en évidence les leviers ou les freins d’accès à ces contraceptions » .
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