Cancer de la prostate

Les avancées récentes sur les marqueurs

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Publié le 15/05/2017
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Si le toucher rectal garde sa place dans le dépistage du cancer de la prostate, celle du PSA évolue. De nouveaux marqueurs apparaissent (1) d’intérêt diagnostique et/ou pronostique.

Les marqueurs d’intérêt pour le diagnostic précoce

L’utilisation du PSA, comme indicateur de la pratique des biopsies prostatiques pour diagnostiquer un cancer de la prostate n’est pas recommandée en dépistage systématique. Il expose au surdiagnostic (biopsies inutiles) et au surtraitement (traitement de lésions microscopiques non évolutives). Cependant, les dernières données de suivi à long terme (13 ans) montrent que l’utilisation du PSA pour 1 000 hommes en situation de dépistage, évite 1 décès par cancer de la prostate et 3 évolutions métastatiques. Ainsi à titre individuel, l’utilité d’un dosage du PSA se discute au cas par cas (recommandations Haute Autorité de santé) et doit être interprété en fonction de l’examen clinique. « Le PSA brut > 4 ng/ml sans contexte clinique, conduit à pratiquer des biopsies qui dans plus de 80 % des cas sont négatives (2) », rappelle le Pr Cussenot.

Chez les hommes à risque génétique (familial), le bénéfice d’un dépistage individuel par dosage du PSA pour réduire la mortalité spécifique est démontré (3). Des tests évaluant le risque génétique ont été proposés (4).

La place du PSA évolue. Il peut, à 50 ans, identifier les patients à risque qui bénéficieraient le plus d’un dépistage régulier. « Des études de cohorte récentes (5) montrent un surrisque de cancer de la prostate évolutif et métastatique, à une échéance de 20 ans quand le PSA est > 1 à l’âge de 50 ans (risque relatif : 1,5 à 2 fois celui de la population générale) », explique le Pr Cussenot.

Éliminer le surdiagnostic

Des tests ont été proposés en cas de PSA élevé associé à des biopsies négatives :

• Sanguins. Index PHi (associe PSA total, PSA libre et pro-PSA) non remboursé ; 4 K score (4 kallicréines spécifiquement prostatiques dont le PSA-kallicréine3 et la kallicréine2) non disponible en France.

Urinaires. Score urinaire de PCA3 (ARNm PCA3/ARNm de PSA), le test est réalisé sur les urines après massage prostatique (6).

Tissulaires. Sur des biopsies prostatiques non tumorales, en cas de forte suspicion de KP, afin d’indiquer de nouvelles biopsies (ConfirmMDx approuvé par la Food and Drug Admistration [FDA] aux États-Unis).

Ils visent à éliminer les sur-diagnostics (élévations de PSA total liées aux hypertrophies bénignes de la prostate HBP) et limiter les biopsies inutiles répétées mais « à peine sur le marché, ils sont concurrencés par l’IRM », note le Pr Cusseno.

Diagnostic précoce

Autre élément de diagnostic précoce : l’IRM multiparamétrique. Elle réduit de près de 30 % les biopsies inutiles avec une sensibilité > 90 %. En associant des séquences complémentaires d’IRM (anatomique, de perfusion, de diffusion) elle permet (7) de visualiser les lésions, de distinguer celles suspectes de celles d’allure bénigne (classification mutiparamétrique PiRads) et de les cartographier. Elle est actuellement évaluée chez les patients à haut risque, en première intension (sans PSA, ni test préalable).

Des techniques de fusion d’image IRM-échographie permettent (8) ensuite de réaliser des biopsies guidées sous échographie des lésions visualisées en IRM. Cette optimisation diagnostique augmente la sensibilité des biopsies en cas d’HBP (> 40 cc).

Lorsqu’un cancer de la prostate est diagnostiqué à un stade précoce, le risque de surtraitement est supérieur (80 % vs 20 %) au risque évolutif vers une maladie métastatique ou mortelle (9). Disposer de marqueurs de risque évolutif pour éviter surtraitement ou un sous-traitement est un enjeu majeur.

Des tests permettent de mieux cerner les patients qui justifieraient d’une surveillance active ou d’un traitement, comme l’index PHi, le 4K score. Dans cette indication, des tests tissulaires moléculaires prédictifs récemment mis sur le marché (Prolaris, Oncotype DX, Decipher) donnent une probabilité de risque évolutif métastatique ou de décès à 10 ans d’un cancer de la prostate en recherchant des signatures moléculaires sur les biopsies (10). Approuvés FDA, ils sont remboursés aux États-Unis, mais pas en France, « Ils peuvent conforter le patient sur l’attitude à adopter (surveillance active ou traitement) », souligne le Pr Cussenot.

L’IRM est aussi un marqueur pronostique : « elle permet d’apprécier l’agressivité de la tumeur et d’éviter l’écueil d’un échantillonnage tumoral non significatif des biopsies (11) », rappelle le Pr Cussenot.

D’après un entretien avec le Pr Olivier Cussenot
(1) Lamy JP et al. Ann Biol Clin 2016;74(2):227-32
(2) Cornu JN et al. Eur Urol 2016;70(1):6-8
(3) Liss Ma et al. J Urol 2015;193(1):75-9
(4) Grönberg H. et al. Lancet Oncol 2015;16(16):1667-76
(5) Vickers AJ et al. BMJ 2013 Apr 15;346:f2023
(6) Ferro M et al. PLoS One. 2013 Jul 4;8(7):e67687
(7) Ahmed HU et al. Lancet 2017;389:815-22
(8) de Gorski A et al. J Urol 2015;194(3):669-73
(9) Hamdy FC et al. N Engl J Med 2016;375(15):1415-24
[10] Renard-Penna R et al., World J Urol. 2015 Jul;33(7):929-36
[11] Renard Penna R et al.,World J Urol. 2016 Oct;34(10):1389-95.

Dr Sophie Parienté

Source : Bilan Spécialiste