Devant des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) en lien avec une hyperplasie bénigne de la prostate (HBP), le bilan initial comprend une évaluation symptomatologique, en particulier à l’aide du score IPSS (international prostate symptom score). « Cet outil est précieux, pour les urologues comme pour les médecins généralistes, afin d’apprécier la sévérité des symptômes de l’HBP de manière précise et reproductible », justifie le Pr Souhil Lebdai, chirurgien urologue au CHU d’Angers. La fonction sexuelle doit aussi être évaluée, en s’enquérant de l’acceptabilité du patient vis-à-vis de potentiels effets secondaires sexuels de médicaments indiqués dans l’HBP, ou d’une dysfonction érectile qui nécessiterait éventuellement d’être traitée de façon concomitante à l’HBP. Si des symptômes prédominent sur la phase de remplissage, il faut renseigner un calendrier mictionnel.
Outre le toucher rectal, l’échographie réno-vésico-prostatique complète le bilan ; l’échographie sus-pubienne suffit pour évaluer le volume prostatique, sans devoir recourir à la voie endorectale.
Un avis urologique est conseillé en cas de résidu post-mictionnel important, de calcul vésical, d’hydronéphrose, de suspicion de cancer de la prostate, et d’un taux de PSA ou d’une créatininémie élevés. « S’il existe une hématurie macroscopique, des infections urinaires récidivantes, énumère le Pr Lebdai, une rétention aiguë d’urine (RAU), des anomalies des organes génitaux externes ou une induration suspecte de la prostate, le patient doit être adressé à l’urologue. » En revanche, si aucun signe d’alerte n’est retrouvé à l’interrogatoire, à l’examen clinique et à l’imagerie, une HBP simple peut être prise en charge en soins primaires, en commençant par rappeler les mesures hygiénodiététiques (limiter la prise de caféine, de théine et d’alcool, ainsi que les apports hydriques après 18 heures, pratiquer une activité physique). Les traitements concomitants (anticholinergiques, diurétiques, neuroleptiques) doivent être réévalués. Ces mesures peuvent suffire à améliorer le confort urinaire d’une partie des patients.
Des options thérapeutiques sur mesure
En cas de symptomatologie plus sévère, les alphabloquants sont les traitements de première ligne. La relaxation des fibres musculaires lisses de la prostate et de la vessie qu’ils induisent améliore le débit urinaire et la vidange vésicale (réduction de l’IPSS d’environ 30 à 40 %). « Il existe un risque d’hypotension orthostatique, qui appelle à la prudence chez les patients âgés, en particulier s’ils prennent des antihypertenseurs, rappelle le Pr Lebdai. Il faut également prévenir le patient de la possibilité de troubles de l’éjaculation. Certains alphabloquants (notamment la silodosine) sont sélectifs de la prostate, causant moins d’hypotension orthostatique mais davantage de troubles éjaculatoires. C’est l’inverse avec par exemple l’alfuzosine, que l’on aura donc tendance à préférer chez un sujet jeune. »
En cas de prostate de plus de 40 cm3, les inhibiteurs de la 5-alpha réductase (I5AR) viennent en deuxième ligne (finastéride, dutastéride). Ce sont les seules molécules agissant sur l’histoire naturelle de la pathologie, en réduisant le volume prostatique, les risques de RAU et le recours ultérieur à la chirurgie, à condition qu’elles soient prises sur une durée d’au moins six à douze mois. Les inhibiteurs de la 5-alpha réductase améliorent l’IPSS d’environ 15 à 30 % et augmentent le débit maximal (Qmax) de 1,5 à 2 ml/s. Cependant, ils exposent à une diminution de la libido, de la qualité des érections et à une prise de poids. Bien que très efficaces en prise au long cours, ils ne sont par conséquent pas recommandés chez les hommes qui souhaitent éviter des effets secondaires sexuels. Ils peuvent être associés aux alphabloquants.
Enfin, les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (IPDE-5) sont pour leur part indiqués dans le cadre de SBAU en rapport avec une HBP, associés à une dysfonction érectile. « Le tadalafil en prise quotidienne à une faible posologie (5 mg/j) améliore à la fois les troubles mictionnels (score IPSS réduit) et la fonction sexuelle », ajoute l’urologue.
La phytothérapie (extraits de plantes Serenoa repens, Pygeum africanum), est à réserver aux symptômes légers à modérés, du fait d’une moindre efficacité comparativement aux autres médicaments. Et de manière générale, en cas d’inefficacité du traitement ou de mauvaise tolérance à celui-ci, le patient peut être adressé à l’urologue pour envisager des solutions chirurgicales.
Entretien avec le Pr Souhil Lebdai, chirurgien urologue au CHU d’Angers
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