Le plan greffe 2017-2021 avait fixé pour objectif 4 950 transplantations rénales par an, dont 1 000 à partir de donneurs vivants. Ces objectifs n’ont pas été atteints et ont conduit les sociétés savantes impliquées dans ce domaine (1) et France Rein à formuler, dans un Livre blanc, des propositions concrètes pour améliorer l’accès à la greffe des patients atteints d’une forme sévère d’insuffisance rénale (2).
La transplantation rénale, comme le stipule la Haute Autorité de santé, est en effet le traitement de choix pour de nombreux patients en insuffisance rénale chronique terminale. Elle permet de restituer une fonction rénale autonome, d’améliorer l’espérance et la qualité de vie des patients. Au-delà de cet effet positif sur la morbimortalité, la transplantation rénale est très performante sur le plan médicoéconomique. Exception faite de la première année où elle induit un surcoût, elle est de cinq à dix fois moins coûteuse que la dialyse.
Augmenter le nombre de donneurs
La pénurie d’organes, conséquence du refus de don par les défunts de leur vivant ou par leur famille et au faible développement du donneur vivant, est l’un des défis auxquels la transplantation rénale est confrontée. « Nous avons aujourd’hui poussé le plus loin possible les limites médicales quant au profil des donneurs décédés, en élargissant les critères en cas de mort encéphalique, et en développant les transplantations suite aux décès par arrêt cardiaque. Il faut désormais lutter contre l’opposition au don (34 % en France contre moins de 15 % en Espagne par exemple), informer le public mais surtout davantage développer le don du vivant », souligne le Pr Marc-Olivier Timsit.
Le développement de la transplantation à partir de donneur vivant n’a concerné en 2019 que 500 des 3 600 transplantations réalisées, loin donc des objectifs fixés par le précédent plan greffe. Elle est l’une des pistes mise en avant dans le Livre blanc de la transplantation, remis aux autorités de santé au printemps dernier afin de les accompagner dans la définition du prochain plan greffe.
Les transplantations à partir de donneur vivant donnent des résultats très supérieurs à celles des donneurs en état de mort cérébrale ou décédés, en termes de survie et de qualité de vie. Elles peuvent même permettre à certains patients de s’affranchir de la dialyse. Elles pourraient avoir une place plus importante en France, comme cela est le cas dans d’autres pays, anglo-saxons en particulier. « Il est difficile de faire des comparaisons directes d’un pays à un autre en raison de la diversité des modes d’organisation », rappelle le Pr Timsit, citant la qualité du maillage territorial pour les prélèvements d’organes dans notre pays. Mais il paraît possible d’accroître la part de ces transplantations puisque les enquêtes montrent que plus de sept personnes sur dix se déclarent prêtes à donner un de leurs organes non vitaux à leur enfant, conjoint, parent ou ami proche (rappelons qu’en France, le don non dirigé ou « altruiste » n’est pas autorisé).
S’inspirer des centres expérimentés
La transplantation par donneur vivant demandant une approche dédiée, les auteurs du Livre blanc proposent de réaliser un audit des centres de transplantation pour mieux en analyser les facteurs de succès. Il paraît donc intéressant de s’inspirer des expériences et mode d’organisation des centres ayant une forte activité de recours aux donneurs vivants. « Sur les 47 centres français, huit réalisent plus de la moitié des transplantations par donneur vivant et si nous regardons les 34 équipes de transplantation adulte, seules cinq ont atteint ou dépassé l’objectif de 20 % de transplantations à partir de donneur vivant fixé par le plan greffe précédent », indique le Pr Timsit. De multiples ressources dédiées sont nécessaires, notamment pour informer et aider le patient dans sa recherche d’un donneur. « Il ne suffit pas de dire au patient de trouver un donneur vivant : il faut le guider et l’accompagner dans sa démarche, ajoute l’urologue. Il faut aussi explorer les donneurs potentiels, faire le bilan médical et rechercher des contre-indications au don (trois à quatre donneurs potentiels sont explorés pour un seul sélectionné). Enfin, il est nécessaire de faciliter l’accès au bloc opératoire, assurer la viabilité des équipes chirurgicales, et accompagner le donneur au-delà de l’aspect purement médical du geste ». Les donneurs peuvent en effet être confrontés à des réticences de la part de leur employeur ou de leur banque pour l’octroi d’un crédit. La neutralité financière (reste à charge zéro pour le donneur) fait également partie des vœux formulés dans le Livre blanc.
D’après un entretien avec le Pr Marc-Olivier Timsit, hôpital européen Georges-Pompidou et hôpital Necker-Enfants Malades, Paris.
(1) Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation, Société francophone de transplantation, Association française d’urologie
(2) https://www.francerein.org/actualites/23-livre-blanc-de-la-transplantat…
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