En France aujourd'hui, un homme de plus de 40 ans sur 3 a une dysfonction érectile (DE). Parmi eux, 18 % ont également une hypertension artérielle (HTA) non diagnostiquée. Différentes études soulignent que la prévalence de la DE est plus élevée en cas d'HTA et il est établi que l'apparition d'une DE chez un hypertendu est un marqueur de risque cardiovasculaire. Enfin, la DE a un impact négatif non négligeable sur l'humeur du patient et l'observance thérapeutique. Toutes ces données ont conduit la Société française d'hypertension artérielle (SFHTA) à proposer un chemin clinique pour guider la prise en charge de la DE chez les patients hypertendus.
Un marqueur indépendant
La première étape, essentielle, est de dépister la DE. Comme le rappellent les recommandations du consensus de Princeton de 2012 et celles de l'ICSM de 2016, la DE ne partage pas seulement les mêmes facteurs de risque que les maladies cardiovasculaires, mais elle est un marqueur indépendant de ce risque. Son dépistage offre ainsi l'opportunité de réduire le risque cardiovasculaire, mais il reste insuffisant. Selon plusieurs études, pas plus d'un médecin sur dix recherche systématiquement une DE et les trois quarts des praticiens déclarent ne pas oser aborder la question de la sexualité avec leurs patients chroniques.
Il apparaît essentiel de penser à rechercher de façon plus systématique une DE, notamment en cas de maladies ou de traitements chroniques associés à une prévalence élevée de DE (association diabète et HTA, traitement antidépresseur, maladie cardiovasculaire), face à une moindre observance ou des questions sur les effets indésirables sexuels des antihypertenseurs ou encore face à des plaintes peu précises à types de fatigue ou de difficultés conjugales.
Il est conseillé de ne pas aborder la sexualité avec son patient sur le pas de la porte, à la fin de la consultation, mais plutôt de le faire lorsqu'une relation de confiance a commencé à s'établir, par exemple en intégrant les questions sur la sexualité aux autres données de l'interrogatoire. « On peut commencer par une question simple, non intrusive et bienveillante, et si besoin s'appuyer sur les éléments du dossier médical en reformulant pour permettre au patient de prendre le temps », a indiqué la Dr Marie-Hélène Colson (Marseille).
Un diagnostic d'interrogatoire
Lorsque c'est le patient qui exprime de lui-même des difficultés sexuelles, il faut éviter d'adopter une attitude de fuite ou de banalisation des troubles. En cas de manque de temps, il faut proposer de reprendre un rendez-vous pour une consultation dédiée à ce problème. Il est approprié d'avoir une attitude empathique, reconnaissant les difficultés du patient tout en gardant la distance nécessaire à la poursuite de l'entretien, de poser simplement et tranquillement toutes les questions nécessaires à la bonne compréhension des troubles, en utilisant des mots simples et en rappelant au patient que le secret médical sera strictement respecté.
Le diagnostic de DE est un diagnostic d'interrogatoire, la sévérité du trouble étant appréciée sur la conservation ou non de la capacité érectile. Il faut se baser sur des critères objectifs, qui seuls permettent d'apporter une solution en première ligne. L'examen clinique général doit être complété par un examen génital (seins, testicules) et par un bilan biologique (glycémie, HbA1c, profil lipidique, et éventuellement testostérone totale et biodisponible).
Ce bilan est nécessaire et suffisant. Il permet de lister les différentes comorbidités, dont certaines peuvent être réversibles. Aucun autre examen n'est recommandé en première intention.
En termes de prise en charge, le simple fait d'aborder la question de la sexualité constitue un acte réparateur à part entière et une information circonstanciée peut suffire dans un certain nombre de cas.
Effets délétères de certains médicaments
La question de l'effet délétère de certains traitements antihypertenseurs a été abordée dans le consensus de Princeton III. Si les médicaments qui interfèrent le moins avec la fonction sexuelle doivent être privilégiés, ceux qui améliorent la maladie cardiovasculaire et la survie ne doivent pas pour autant être écartés. Les antihypertenseurs les plus récents (IEC, ARA2, antagonistes calciques et bêtabloqueurs vasodilatateurs) ont des effets neutres, voire bénéfiques sur la fonction érectile.
En pratique, la réalité de la responsabilité des médicaments dans la survenue de la DE, quelle que soit leur classe, est généralement difficile à établir. Lorsque le patient est persuadé de la responsabilité d'un traitement, il est le plus souvent possible de proposer une autre molécule d'efficacité équivalente. Dans tous les cas, l'association à un traitement de l'érection est indiquée pour améliorer concrètement l'érection et réduire les perturbations émotionnelles.
D'après la communication du Dr Marie-Hélène Colson, psychothérapeute, sexologue et directrice d'enseignement de sexologie à la faculté de médecine (Marseille)
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