Strabisme

Dépistez avant l’âge de 2 ans !

Publié le 18/01/2013
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Le prochain rapport de la Société Française d’Ophtalmologie fait le point sur le strabisme, une pathologie qui doit être dépistée tôt chez l’enfant, afin d’en déterminer les causes et d’éviter les conséquences à long terme de l’amblyopie.

Les enfants présentant un strabisme sont 2 à 3 % et dans deux cas sur trois, ce strabisme s’accompagne d’une baisse de la vision de l’œil dévié, c’est-à-dire d’une amblyopie. Cette pathologie fréquente a été choisie par la Société Française d’Ophtalmologie (SFO) comme thème de son rapport annuel, qui sera

présenté lors de son congrès en mai prochain (lire encadré). « Il est primordial de dépister tôt un strabisme afin que ne s’installent pas à long terme des complications visuelles », insiste Le Pr Alain Pechereau, strabologue et ophtalmo-pédiatre au CHU de Nantes, nommé rapporteur de l’ouvrage de la SFO. Il faudra donc veiller au respect du calendrier de dépistage, qui prévoit des bilans ophtalmologiques à réaliser à la naissance, à 9 mois et à 24 mois.

« La première année de vie est très importante et il est nécessaire de contrôler la fonction monoculaire et binoculaire », poursuit l’ophtalmologiste. Déjà, dans le premier mois de vie, l’enfant doit pouvoir voir de chaque œil et des deux yeux simultanément, cette expérience visuelle lui permettant de développer des réseaux neuronaux. Puis, entre 4 et 12 mois, s’installe la vision binoculaire (le fait de voir une seule image avec les deux yeux). Un élément fondamental à ne pas oublier : « Si cette vision binoculaire n’est pas instaurée à 12 mois, les neurones et leurs connexions ne pourront donc pas se mettre en place et il sera très difficile de récupérer une vision normale ensuite », prévient Alain Pechereau.

En cas de suspicion de désordre oculomoteur, le recours au spécialiste s’impose afin de réaliser des examens complémentaires (fond d’œil, dilatation de la pupille, bilan anatomique).

La toxine botulique efficace pour le long terme

Côté traitement, l’objectif dans le strabisme est de corriger l’alignement de l’œil ou des deux yeux. Dans certains cas, des lunettes peuvent être prescrites. Mais, en général, une chirurgie est nécessaire tôt ou tard (et dans tous les cas avant l’âge de 6 ans).

« Toutefois, les études n’ont pas permis de trancher quel était l’âge optimal pour opérer », remarque le spécialiste qui précise également que « le strabisme étant une pathologie instable, le patient pourra être opéré plusieurs fois si nécessaire ». La chirurgie du strabisme a connu des progrès dernièrement : « On prend notamment de plus en plus en considération la position des yeux sous microscope lors de l’anesthésie ainsi que l’extensibilité des muscles de l’œil. Aussi, on réfléchit beaucoup pour savoir quel œil opérer, sachant que, dans le strabisme, les deux yeux sont toujours touchés et le plus déviant n’est pas forcément le plus atteint ». Par ailleurs, chez les enfants très jeunes, entre 6 mois et 2 ans, et seulement en cas de strabisme convergent, on préfère généralement avoir tout d’abord recours à un traitement par injection de toxine botulique : celle-ci entraîne une paralysie du ou des muscles hyperactifs et permet de traiter définitivement plus de 50 % des strabismes. « Ce qui revient à dire qu’on divise par deux le nombre d’enfants à opérer », se réjouit le strabologue qui explique que, suite à l’agression thérapeutique provoquée par la toxine, les réseaux neuronaux peuvent se « reformater tel un disque dur d’ordinateur qui redémarre » et fonctionner mieux.

La hantise de l’amblyopie

Car la hantise des ophtalmologistes, c’est l’amblyopie, conséquence d’un défaut d’apprentissage de la fonction visuelle durant l’enfance. Une fois installée, elle peut être traitée par le port d’un bandeau afin de forcer l’amélioration de la vision de l’œil le plus faible. Elle sera suivie d’une rééducation orthoptique prolongée (avec un traitement d’entretien sur cinq ans), au risque, sinon, de voir cette acuité visuelle baisser de nouveau. Cette prise en charge, aujourd’hui bien codifiée, permet une récupération dans 95 % des cas. A l’inverse, si le traitement est retardé, l’amblyopie peut devenir permanente.

Charlotte Demarti

Source : lequotidiendumedecin.fr