Tout au long de son parcours, de la présidence de Charles de Gaulle jusqu’à la sienne, l’argument de la santé increvable de Jacques Chirac aura indéniablement contribué à son image de force de la nature et à son succès. Ses déplacements officiels épuisaient son entourage, mais pas lui, confiait au « Quotidien » sa porte-parole de la campagne 2002, une certaine Roselyne Bachelot (« le Quotidien » du 21 mars 2002). Sa faculté de récupération, avec des micro-siestes, son goût immodéré pour une cuisine roborative (honneur à la tête de veau gribiche) arrosée de bière mexicaine (Corona, pour ne pas la citer) ont participé de la geste chiraquienne éternelle. Sans entamer, soulignait son entourage, son hygiène de vie, avec des exercices tous les matins sur son vélo d’appartement.
Le tabou de l'hypoacousie
Les événements médicaux sont survenus dès 1978, avec un accident sur une route de Corrèze, le 26 novembre, qui a nécessité une hospitalisation à Cochin, d’où sera lancé l’appel du même nom, par celui qui était alors maire de Paris, en rupture de ban avec Giscard. Beaucoup plus tard, en 2003, l’affaire du Sonotone a agité le microcosme. Roselyne Bachelot, encore elle, alors ministre de l’Écologie, a confirmé que le président était équipé d’une prothèse auditive. Alors que six mois plus tôt, Lionel Jospin, lors de la campagne, avait évoqué l’âge du capitaine, « vieilli et usé », et que des rumeurs avaient évoqué une opération de chirurgie esthétique l’été précédent, tandis que, disait-on, comme de nombreux politiques, Chirac se teignait les cheveux et portait des lentilles de contact, cette allusion à l’hypoacousie présidentielle suscita des dénégations ministérielles.
Anosognosie
Mais le tabou de l’âge et de la maladie est devenu véritablement affaire d’État après l’accident vasculaire cérébral (AVC) du 2 septembre 2005. Trois communiqués officiels (à la sortie de l’hôpital du Val-de-Grâce, un mois après et huit mois plus tard) indiquaient que les examens de contrôle étaient « satisfaisants », après ce qui était qualifié de « petit AVC ». L’entourage murmurait cependant que le président souffrait d’un problème de mémoire immédiate et que son champ visuel latéral était réduit. Les caméras le montraient avec une démarche hésitante, chaussant de grosses lunettes pour ses allocutions télévisées, dont la longueur était réduite. L’hallali d’un président crépusculaire se répandait alors, malgré la bataille de communication livrée contre la rumeur par Claude Chirac, la conseillère et la fille.
C’est finalement en 2011, que le tabou sur la santé de l’ancien président a été officiellement brisé. Dans le rapport médical qu’il remit à la justice dans le procès des emplois fictifs à la mairie de Paris, dirigée de 1977 à 1995 par Chirac, le Pr Olivier Lyon-Caen indiquait que l’ancien président était atteint, depuis plusieurs mois déjà, d’anosognosie. Bernadette Chirac ajoutait alors : « Les médecins lui ont dit qu’il n’a pas la maladie d’Alzheimer, je les crois. » Et son gendre, Frédéric Salat-Baroux, ajoutait : « Il grogne, donc ça veut dire qu’il va bien. »
L’ancien président se fait de plus en plus rare. En février 2014, il est hospitalisé à l’hôpital américain de Neuilly-sur-Seine pour « une violente crise de goutte ». Le 21 novembre 2014, il effectue sa dernière sortie publique, au musée du Quai Branly, qui porte maintenant son nom.
Quelques jours plus tard, début décembre, il est hospitalisé une semaine à la Pitié-Salpêtrière pour « une intervention rénale ».
Fin 2015, il est hospitalisé à nouveau à la Pitié pendant deux semaines pour « des examens complémentaires » en raison d’un « affaiblissement », indique Bernadette Chirac, et il regagne son domicile « plus fatigué que d’habitude ».
Alors que sa fille aînée Laurence meurt en avril 2016, son ami Jean-Louis Debré confie : « Quand je le regarde et que je lis dans ses yeux, je vois qu’il souffre. Je sais qu’il a de la peine. »
Le 18 septembre 2016, Jacques Chirac rentre 24 heures plus tôt que prévu du Maroc où il était en villégiature et il est hospitalisé en urgence pour une infection pulmonaire à la Pitié. Immédiatement, les paparazzis se précipitent et photographient le clan Chirac éploré, la twittosphère s’enflamme et l’ancienne ministre Christine Boutin annonce sur Twitter la mort de Jacques Chirac. Trois ans trop tôt...
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