LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Pourquoi réaliser cette nouvelle campagne sur le don de gamètes ?
Pr DOMINIQUE ROYÈRE : Nous observons une évolution très régulière des dons de gamètes, notamment des dons d’ovocytes. Il y a eu 422 dons en 2012 et 456 en 2013, contre 265 en 2008. Nous considérons qu’il faut 900 donneuses pour atteindre l’autosuffisance, étant donné qu’un don peut servir le projet parental de deux receveurs et que 2 173 couples étaient en attente d’un don d’ovocyte en 2013 (un chiffre un peu plus élevé que la réalité, certains couples ayant déposé un dossier dans plusieurs centres). Il faut aussi 300 donneurs de spermatozoïdes, contre 268 en 2013.
La campagne radiophonique du mois de juin a permis de sensibiliser des donneuses qui n’avaient pas connaissance, dans leur entourage, d’une situation d’infertilité et qui n’étaient pas même informées de la possibilité d’un don d’ovocyte. Selon une enquête que nous avons réalisée en décembre 2014, 43 % des Français ignoraient que ce don était autorisé en France ! Il y a donc eu une prise de conscience.
Cette nouvelle campagne doit permettre d’augmenter encore le nombre de dons, en touchant, en plus de la population générale, une population plus jeune qui n’a pas encore procréé, à la suite de la parution au « J.O. » du décret du 13 octobre.
Quelles sont les nouvelles règles ouvertes par ce décret et quand entreront-elles en application ?
Ce décret permet aux femmes de 18 à 37 ans en bonne santé, et aux hommes de 18 à 45, qui n’ont pas eu d’enfants, de donner leurs gamètes. Ils peuvent dès à présent se présenter dans les centres de dons pour s’informer, connaître les modalités pratiques, et décider de poursuivre ou non leur démarche.
Un arrêté produit et édité par la direction générale de la santé, sur proposition de l’agence de la biomédecine, doit préciser la règle de répartition des ovocytes et paillettes entre ceux conservés pour le don et pour soi-même et les conditions d’établissement du dossier, anonyme pour le don, non anonyme pour l’autoconservation. Nous pensons que les choses iront rapidement, pour une publication certainement avant la fin de cette année.
Dans quelle mesure ce décret ouvre la porte à l’autoconservation ovocytaire ?
Le texte met l’accent sur le don. Les donneurs peuvent conserver une partie de leurs propres gamètes, dans l’éventualité où ils se retrouveraient confrontés dans le futur à une situation d’infertilité ou à un risque de transmission d’une maladie grave. Mais la priorité reste le don, et il pourra arriver des situations où il n’y aura pas assez d’ovocytes pour réaliser une autoconservation.
Le décret rappelle la priorité du don dans d’autres cas. Lorsqu’un donneur n’est pas confronté à des problèmes d’infertilité et a fortiori quand une femme dépasse les limites de l’âge de procréation, lorsqu’il néglige les relances demandant s’il souhaite conserver ses gamètes, ou s’il décède, l’autoconservation sera reversée vers le don.
Est-ce un premier signe d’ouverture vers indications sociétales de l’AMP ?
Nous restons dans les modalités d’application de la loi de bioéthique de juillet 2011, inspirée sur ce sujet du rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur le don d’ovocytes. Je n’ai pas de boule de cristal pour savoir comment la réflexion sera menée par le truchement des états généraux de bioéthique et le parlement, ni quelle sera à l’avenir la position de la société sur ces questions.
L’ouverture du don à des personnes n’ayant pas procréé permettra-t-elle d’atteindre l’autosuffisance ?
Entre la population des femmes âgées de 30 à 37 ans et cette nouvelle population des nullipares, l’hypothèse qu’on puisse doubler le nombre actuel de donneuses est plus que raisonnable. Peut-être pas en un an, mais à l’échelle de quelques années, certainement.
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