Après des convocations en Ariège en juin dernier, c’était au tour de quatre médecins de Loire-Atlantique de se retrouver ce vendredi en procès à Nantes pour refus de paiement de cotisation à l’Ordre, un refus qui s'inscrit dans un mouvement plus global d'insoumission et de contestation de l'institution ordinale.
Ce matin, bon pied bon œil, ils étaient une bonne vingtaine de médecins et soutiens réunis dès 8 heures devant l’austère palais de justice de Nantes, à l’appel du petit Syndicat de la médecine générale (SMG) et du mouvement d’insoumission aux Ordres professionnels (Miop). Ces organisations appellent ouvertement à la dissolution de l’Ordre. Brandissant haut leurs pancartes « Ordre = malversations », « Ordre complice des souffrances au travail et du patriarcat », ils discutent de l’audience à venir et de leur stratégie, l’air détendu.
Leur mobilisation s'est réactivée en 2020, peu après la parution du rapport accablant de la Cour des comptes sur l’institution ordinale. Indemnités mirobolantes versées aux conseillers, lacunes dans le contrôle des conventions passées entre médecins et laboratoires pharmaceutiques, désordres comptables, laxisme disciplinaire, etc. : une longue liste de dysfonctionnements y étaient épinglés.
« La majorité des médecins paie »
« Ce qui m’a le plus choqué dans ce rapport, c’est le côté "clergé" de l’institution, avec une défense des médecins à tout prix, même parfois de ceux qui étaient poursuivis pour agressions sexuelles sur des patients, explique le Dr Guillaume Getz, l’un des généralistes convoqués ce matin. C’est extrêmement grave. Je ne paie plus ma cotisation depuis 2020. La majorité des médecins la paie sans se poser de questions, alors que le constat de la Cour des comptes est accablant. »
La contestation de l'Ordre des médecins n'est bien sûr pas nouvelle. En 1981 déjà, après la promesse du candidat Mitterrand de supprimer l’Ordre – annonce restée lettre morte –, certains médecins s’étaient aussitôt mobilisés. La Dr Marie Kayser, généraliste retraitée depuis, se souvient. « Très déçue par cette promesse non tenue, j’ai arrêté de payer ma cotisation pendant des années, mais j’ai été condamnée à le faire à la fin des années 80. En plus de l’opacité de gestion, l’Ordre n’accomplit pas ses missions et prend des positions syndicales, ce qui n’est pas son rôle », dénonce-t-elle. Quarante ans plus tard, rien n’a changé à ses yeux, et elle est convoquée à nouveau, avec le sourire.
Pénalités
Que risquent les médecins convoqués ? Pas grand-chose, à en croire le Dr Patrick Lamour, condamné il y a deux mois à payer avec retard sa cotisation annuelle (335 €) plus 35 € de pénalités. « Après de nombreux courriers de relance, je m’attendais à ce qu'ils me réclament deux fois le montant de ma cotisation, comme les impôts, mais non », confie-t-il, avant d’appeler l’ensemble de ses confrères à la mobilisation. De son côté, la Dr Kayser avait écopé – elle aussi – de pénalités à verser à la fin des années 80, mais le montant était loin d’être astronomique ; pour preuve : elle l’a oublié !
L’audience n'aura duré que cinq minutes, renvoyée au 15 novembre. Deux autres médecins nantais viennent en effet de recevoir un courrier d’huissier et attendent leur convocation. Leurs avocats ont donc demandé un renvoi pour organiser une audience commune avec les six médecins concernés.
En attendant, l’un d’eux indique avoir fait don de sa cotisation… au Planning familial. Une initiative saluée par les avocats car elle souligne, selon eux, le sens du combat de ces médecins : donner davantage de moyens aux associations mobilisées sur le terrain pour la santé publique et non pas à une institution qui, selon eux, ne remplit pas ou plus cette mission.
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