Serait-ce le pot de terre contre le pot de fer ? Depuis plusieurs années, un médecin-conseil narbonnais est en conflit avec ses employeurs, la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Aude et la caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), dont il dénonce les méthodes de travail réclamées aux médecins-conseils. Révélée par « L'Indépendant » à l'occasion d'un dernier rebondissement, l'affaire remonte en fait à 2014.
À cette époque, le Dr François Vives, 64 ans, accuse sa hiérarchie de harcèlement moral. Il saisit le conseil des prud'hommes en novembre 2014, en demandant que son contrat de travail soit résilié, avec indemnisation du préjudice subi. En cause, selon lui, une surcharge de travail excessive, de mauvaises conditions de travail avec des dépassements d'horaires et des pressions « contraires à la déontologie médicale ». Selon l'avocat du médecin, Me Cyril Cambon, le médecin devait notamment procéder à des « signatures par lot », c'est-à-dire « accepter ou rejeter tous les arrêts de travail pour lombalgie par exemple », sans différenciation selon le dossier.
Ces conditions de travail auraient conduit le Dr Vives vers un état dépressif. C'est en tout cas ce que retient le jugement des prud'hommes, consulté par « le Quotidien » et qui se fonde sur les courriers fournis dans les pièces du dossier. Des accusations que rejette la Caisse nationale d'assurance-maladie dès le départ. Elle se défend d'une charge de travail trop importante – qu'elle qualifie de « raisonnable » – et récuse les accusations de harcèlement moral, non démontrées par le médecin. Selon la caisse, ce dernier a par ailleurs « largement contribué » à la dégradation des relations avec son employeur « en affirmant clairement son intention de ne rien faire pour améliorer la situation ».
200 000 euros de condamnation
Mais la lecture « de nombreux courriers demandant au [médecin] salarié une rentabilité accrue tout en respectant son contrat de travail » ont joué dans la décision des prud'hommes. Dans le jugement en date du 9 juin 2016, ils donnent finalement raison au médecin, en condamnant la caisse à lui verser 12 500 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral ainsi que plusieurs autres types d'indemnités pour plus de 200 000 euros en tout.
Une sanction dont la caisse d'assurance-maladie n'a pas fait appel à l'époque. La même année, le médecin-conseil obtient la reconnaissance de sa dépression en maladie professionnelle par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Toulouse. Une nouvelle procédure était sur le point de débuter au tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS), le médecin voulant faire reconnaître « la faute inexcusable de l'employeur ».
Mais coup de théâtre, l'Assurance-maladie a fait savoir qu'elle acceptait une conciliation, ce qui bloque toute procédure au tribunal, explique Me Cambon. Au cours de cette conciliation, dont la date n'a pas été fixée pour le moment, l'ancien employeur du Dr Vives peut proposer une somme d'argent, « ou le doublement de la rentabilité de sa prime d'invalidité », avance l'avocat. Une proposition que devrait rejeter le médecin lanceur d'alerte, pour qui la justice est plus importante que l'argent, analyse encore son conseil.
Contactée à plusieurs reprises par « le Quotidien », la Caisse nationale d'assurance-maladie n'a pas souhaité nous répondre sur ce sujet.
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