Le 30 janvier dernier, les personnels des EHPAD marquaient leur mécontentement par une journée d’action. Au-delà des EHPAD, cette actualité remet en avant un sujet brûlant : le financement du grand âge et de la dépendance, et plus largement celui de la transition démographique.
Or, cette question a été sans cesse repoussée. Ainsi, la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement ne règle ni le financement de la dépendance ni celui de la protection sociale. Un grand débat public est nécessaire, dès maintenant !
Après le papy boum, il faut en effet éviter le « papy crack ». Selon une étude publiée par le ministère de la Santé en octobre 2017, les dépenses de prise en charge du grand âge devraient doubler d’ici à 2060. La part publique passerait de 1,11 à 2,07 points de PIB, et la dépense totale de 1,4 à 2,78 points de PIB. Quant au nombre de personnes âgées de plus de 85 ans, certes pas toutes dépendantes, il passerait de 1.5 million à 5 millions en 2050.
Historiquement appuyé sur le travail, et une main-d’œuvre abondante, le financement de la protection sociale est assis depuis la Libération sur les salaires pour environ 70 %. D’une certaine façon, chaque produit vendu participait alors au financement de la protection sociale.
Compte tenu des mutations économiques, asseoir les charges sociales sur la seule assiette des salaires apparaît en déphasage avec notre société actuelle. Avec l’automatisation des processus de production, de plus en plus de biens sont fabriqués sans intervention de l’homme. Leur production, souvent délocalisée, est de ce fait exempte de charges sociales. Il n’est plus tenable que seuls les produits à forte main-d’œuvre, et de plus fabriqués en France, supportent le poids desdites charges !
Au-delà de la maîtrise des dépenses de santé qui a bien des limites, des efforts individuels, par le biais d’un système faisant une part plus grande à l’assurance privée (pour partie obligatoire ?), la solidarité nationale doit s’organiser, pour les plus modestes notamment. Il faut d’autres solutions qu’une simple augmentation de la CSG et des impôts qui freinent la compétitivité de notre économie. De surcroît, une fois encore, les classes moyennes seraient affectées en tout premier lieu. Une réforme systémique s’impose.
Le PMCS est une solution.
C’est l’objet du Plancher Minimum de Charges Sociales (PMCS). Le PMCS vise à augmenter les recettes de la « Sécu », grâce à une contribution sur les produits faisant peu appel à l'humain, sous l’effet d’une automatisation accrue. Le progrès offre aujourd’hui une baisse des prix qui pourrait avec le PMCS, financer la protection sociale.
Certains pans de l'économie, dits à « hautes charges sociales », contribuent largement à son financement (secteurs du bâtiment, de l'hôtellerie, de la restauration ou même de l’éducation). En revanche, d’autres secteurs d’activité, plus automatisés, sont à « basses charges sociales ». Ces derniers pourraient supporter une nouvelle contribution, bien sûr concertée et très progressive, d’autant plus neutre que, dans ces secteurs, sous l'effet des avancées techniques et technologiques, les coûts de production diminuent.
Une réforme sur 15-20 ans
Concrètement, le principe du PMCS est le suivant :
Il s’applique sur le prix de vente de tout produit ou service, avant TVA. Si le poids des charges sociales dans ce prix est inférieur au plancher minimum de charges sociales, une contribution est prélevée afin d’atteindre le seuil fixé.
Néanmoins, étant donné que plusieurs entreprises interviennent dans le processus de production, il ne faut pas qu’il soit cumulatif. Ainsi, pour effectuer le calcul, on applique le PMCS sur le prix de vente auquel on a préalablement soustrait le prix des achats nécessaires à la production.
Dans la pratique, cela revient à retirer du chiffre d’affaires hors taxe, le prix des achats de l’entreprise, à calculer le pourcentage que représente dans ce chiffre le poids des charges sociales. Si celui-ci est inférieur au plancher minimum de charges sociales, un prélèvement est alors ajouté afin que la contribution de l’entreprise à la protection sociale atteigne ce seuil.
Le PMCS s’applique à tous les produits consommés en France, ce qui élargit l’assiette taxable et présente l’avantage de faire contribuer les produits importés au financement de la protection sociale.
La mise en place du PMCS se fera progressivement, sur 15-20 ans, par une augmentation annuelle du plancher. Des ajustements pourront être faits, au fur et à mesure des bilans et évaluations, réalisés régulièrement.
Notre protection sociale est un des piliers de notre société et de l’excellence française, un des fondements du Pacte Républicain. Il importe de la sauver et de répondre aux défis de notre temps.
Article précédent
Une solution mutualiste pour répondre aux défis du vieillissement
Une solution mutualiste pour répondre aux défis du vieillissement
Pour éviter le « papy crack », de nouvelles ressources sont nécessaires.
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships