Accès aux soins : le nombre de mineurs isolés vus par MDM a été multiplié par 5 en cinq ans

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Publié le 14/10/2016
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Crédit photo : AFP

Médecins du monde (MDM) vient de publier, comme chaque année, son rapport annuel sur l'accès aux droits et aux soins des plus démunis en France, à l'occasion de la journée mondiale du refus de la misère qui se tiendra le 17 octobre.

En 2015, l'association a effectué près de 40 000 consultations médicales et plus de 34 000 entretiens sociaux. Dans 95 % des cas il s'agissait de personnes d'origine étrangère. Près de 98 % de ces patients vivent en dessous du seuil de pauvreté, 90 % sont en hébergement précaire, 39 % ont un retard de recours aux soins et 16 % déclarent avoir dû renoncer à ces soins.

Plus de 4 femmes enceintes sur 10 ont un retard de suivi de grossesse et 17 % d'entre elles vivent dans la rue. Enfin, 88 % ne disposent d'aucune couverture maladie lors de leur première visite, alors que près des 3/4 pourraient théoriquement en bénéficier.

Des problématiques émergentes en 2015

Pour MDM, l'année 2015 a été marquée par une arrivée massive de réfugiés et de migrants sur le territoire français et par la question de la prise en charge des enfants et des mineurs non accompagnés.

Le nombre de mineurs isolés rencontrés par l'association a été multiplié par 5 en 5 ans et ces enfants, principalement des migrants, vivent le plus souvent dans la rue. « Il y a une obligation réglementaire de les accueillir et de les protéger mais aucun dispositif spécifique n'a été mis en place », déplore le Dr Françoise Sivignon, présidente de l'association.

Elle souligne les obstacles à la prise en charge médicale des mineurs de 16 à 18 ans, considérés ni comme des enfants (pédiatrie), ni comme des adultes. « L'accès à la couverture maladie, la prise en charge dans les hôpitaux posent problème », regrette-t-elle. Et le SAMU social n'accueille les personnes qu'à partir de 18 ans.

D'une façon générale, l'association déplore « l'absence d'ambition politique de la France dans sa politique migratoire et (le fait) qu'il n'existe pas de plan national qui réponde à ces personnes ». Selon le Dr Sivignon, « Les valeurs de la France ont beaucoup perdu en 2015; il n'y a pas de discours d'accueil, de protection, et volontariste vis-à-vis des migrants ».

La loi de santé « réduite à une peau de chagrin »

Pour MDM, la loi de Santé n'a pas apporté les changements majeurs attendus : peu de place accordée à la prévention en PMI ; pas de reconnaissance des mineurs isolés ; problématique du refus de soins confiée aux ordres professionnels plutôt qu'à un organisme indépendant.

L'ONG, qui reconnaît une avancée avec la protection universelle maladie regrette que la loi n'ait pas évolué sur la prise en charge des étrangers. Selon Jeanine Rochefort, déléguée régionale Ile-de-France de l'association, « certes, l'AME existe, mais il y a de très grandes disparités de gestion entre les différentes caisses de sécurité sociale ». Quant au tiers payant généralisé, il s'agit d'une « victoire temporaire » car il ne sera obligatoire qu'au 1er décembre 2017. « Entre-temps, il y aura l'élection présidentielle ; le dispositif est donc très fragile », souligne Mme Rochefort.

De nouvelles orientations

Après plus de 30 années d'existence, l'association souhaite s'engager plus fortement sur l'orientation des patients vers les dispositifs de soins plutôt que dans leur prise en charge, la promotion de la santé et l'incitation à l'évolution des politiques de santé. Elle signale qu'un de ses axes de travail est de faire en sorte que les médecins libéraux soient plus formés et plus impliqués dans l'accueil des migrants.

Des réflexions en termes d'appui social et d'aide pour l'accueil de ces personnes qui, souvent, ne parlent pas Français, sont en cours. L'association attend de ces rencontres qu'elles soient un véritable échange. « Nous allons vers eux, mais ils viennent également vers nous », souligne Yannick Le Bihan, directeur des opérations France de l'association. 


Source : lequotidiendumedecin.fr