La santé rentable : un autre discours sur les dépenses

Publié le 09/11/2011
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CONSACRER une plus grande part de notre richesse nationale à la santé ne relève-t-il pas du simple bon sens ? Économiste, Philippe Askenazy partage en tout cas cette idée avec le Pr Didier Sicard, président d’honneur du comité consultatif national d’éthique. Les deux hommes étaient invités à débattre lors d’un colloque intitulé « La santé est-elle rentable ? » proposée à la faculté de médecine Paris Descartes.

En appréciant « ce discours décalé » le Pr Patrick Berche, doyen de la faculté, appelle lui aussi à « changer de regard sur les patients et les professionnels, accusés les uns et les autres de coûter trop chers ». Avec la crise en toile de fond, et à l’heure d’un nouveau plan de rigueur qui n’épargne pas la santé, le moment serait venu de changer radicalement d’approche et d’en finir avec les coups de rabot récurrents.

Les dépenses de santé pèsent lourd dans le budget des États qui y consacrent une part de plus en plus importante de leur richesse nationale, jusqu’à 18 % désormais aux États unis. En comparant ce haut niveau d’investissement à ce que consacre à la santé l’Allemagne, l’Espagne et la France, Philippe Askenazy estime que l’effort n’est pas au rendez-vous en Europe. « Avec un niveau de dépenses plafonné à 8 % de notre PIB, en France on cherche à économiser, rogner sur le prix des médicaments et des hôpitaux, regrette-t-il. Une approche étonnante à l’heure où il est demandé à tous d’être plus efficace et productif pour faire face à la crise économique ». Le Pr Didier Sicard abonde : « Dépenser pour la santé c’est investir dans le capital humain, dans l’éducation, la formation et se donner plus de chances de développer le marché du travail ». Rappelant qu’aujourd’hui, l’Allemagne forme trois fois plus de médecins que la France, Didier Sicard s’emporte qualifiant les politiques malthusiennes actuelles de suicidaires : « La France est devenue un paradis pour les investisseurs américains et du Moyen-Orient, l’attractivité de nos maisons de retraite pour les fonds de pension américains doit nous faire vite réfléchir. »

LAURENCE MAUDUIT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9038