Le vaccin contre la dengue augmente le risque d'infection grave en zones de faible endémie

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Publié le 02/09/2016
Dengvaxia

Dengvaxia
Crédit photo : AFP

Loin d'être protecteur, le vaccin contre la dengue pourrait augmenter le risque d'infections graves en zones de faible endémie, selon une étude britannique publiée dans « Science ».

C'est la conclusion surprenante tirée par les chercheurs de l'Imperial College of London et de l'université de Floride d'après l'analyse avec modélisation mathématique des données cliniques (10 pays, 30 000 sujets) du Dengvaxia, premier vaccin contre la dengue.

Si le Dengvaxia est autorisé dans 6 pays, de nombreux pays se demandent comment utiliser le vaccin. Les chercheurs proposent de nouvelles recommandations pour éclairer les choix et améliorer la pertinence de la vaccination. Selon eux, la vaccination dans les pays de forte endémie diminue de 20-30 % les hospitalisations, alors qu'elle les augmenterait en pays de faible endémie.

La position de l'OMS confortée

Cette publication va dans le même sens que la position de l'OMS adoptée en juillet 2016. L'OMS recommande la vaccination des populations en cas de séroprévalence supérieure à 70 %, la juge acceptable en cas de séroprévalence entre 50 et 70 % et estime qu'elle ne devrait pas être réalisée en cas de séroprévalence inférieure à 50 %.

Les scientifiques britanniques confirment le fait que la vaccination a un effet inverse selon le statut sérologique « soit booste l'immunité des sujets préalablement exposés à la dengue (séropositifs), soit augmente la morbidité de l'infection chez les sujets naïfs (séronégatifs) », expliquent les auteurs. Le vaccin n'est d'ailleurs pas indiqué chez les enfants de moins de 9 ans, dont la probabilité d'avoir déjà eu la dengue est faible.

Une sérologie avant de vacciner

Le vaccin chez des sujets séronégatifs augmenterait le risque d'infections graves « pseudo-secondaires ». Ce constat n'est pas aussi contre-intuitif qu'il y paraît au prime abord. Il est connu qu'une infection préalable par l'un des quatre sérotypes de la dengue augmente la gravité lors d'une réinfection ultérieure par un sérotype différent, via un phénomène dit ADE dépendant des anticorps (ou antibody-dependant enhancement). Chez les sujets séronégatifs, le vaccin serait l'équivalent d'une infectieuse silencieuse.

Selon leurs travaux, dans les zones de faible endémie, la vaccination augmente le risque d'infection plus grave et globalement le nombre d'hospitalisations pour la dengue. Dans les zones à transmission modérée, l'impact serait globalement positif mais la vaccination augmente le risque d'infection grave chez les sujets séronégatifs. Dans les zones à forte endémie, la vaccination serait bénéfique à la fois chez les sujets séropositifs et séronégatifs.

Afin de maximiser les bénéfices de la vaccination et en limiter les risques, les auteurs proposent de réaliser des sérologies pour identifier les candidats à la vaccination. Selon eux, cette stratégie permettrait de réduire d'au moins 30 % l'incidence des hospitalisations pour dengue. 

Dr Irène Drogou

Source : lequotidiendumedecin.fr