Les députés votent à l'unanimité la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés

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Publié le 21/07/2022

Crédit photo : Phanie

C'était une revendication de longue date des associations. L'Assemblée nationale a voté à l'unanimité moins une voix (celle du député Horizons de la Charente Thomas Mesnier) dans la nuit du 20 au 21 juillet la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), en adoptant des amendements déposés par tous les groupes, dans le cadre du projet de loi sur le pouvoir d'achat. Au plus tard en octobre 2023, les revenus du conjoint ne seront donc plus pris en compte pour le calcul de cette prestation.

La précédente législature avait rejeté à six reprises cette réforme, la majorité estimant que certains allocataires y perdraient et que le coût serait trop important. Mais la Première ministre Élisabeth Borne avait amorcé un changement de position dès son discours de politique générale : « Nous partirons du principe de la déconjugalisation », avait-elle déclaré.

« Nous vivons un moment historique », s'est félicité le ministre du Travail Olivier Dussopt. Le socialiste Arthur Delaporte a salué une mesure qui remédie au « prix de l'amour et à l'humiliation ». « Je crois que s'il y a un sujet qui mérite ce soir de voter ensemble, c'est bien celui qui va permettre la déconjugalisation de l'AAH », a déclaré Marine Le Pen, à la tête des députés Rassemblement national.

« La réforme de l’AAH mérite un débat et une loi dédiée, globale, structurelle. Beaucoup plus qu’un amendement écrit en quelques jours, voté dans la nuit, dans un texte dédié à autre chose », a justifié sur Twitter le député et urgentiste Thomas Mesnier, seul opposant à ce texte.

Débat sur la date d'entrée en vigueur

La date de l'entrée en vigueur de la réforme a néanmoins fait l'objet de débat et devrait rebondir lors de l'examen du texte au Sénat. « Octobre 2023 c'est trop tard », ont objecté les écologistes à propos du délai d'application.

« Des considérations techniques nécessitent un délai de mise en œuvre », à l'instar de modifications des systèmes informatiques, a plaidé la rapporteure de la majorité Charlotte Parmentier-Lecocq, pointant des amendements qui ne sont « pas réalistes ». « Une réunion de travail technique » sera organisée, a promis Olivier Dussopt. « Si nous pouvons aller plus loin nous le ferons ».

Dans un communiqué commun, une vingtaine d'associations* a salué une avancée historique, tout en regrettant une date d'entrée en vigueur trop lointaine. « Nos associations poursuivent leur mobilisation auprès des sénatrices et sénateurs pour une mise en œuvre plus rapide », écrivent-elles.

1,2 million de bénéficiaires

Si 160 000 personnes vont voir leur allocation augmenter de 300 euros en moyenne, selon des évaluations menées par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), environ 45 000 personnes pourraient être lésées en cas de déconjugalisation sèche. Pour pallier cette perte, un « dispositif transitoire » a été adopté par les députés.

« Nous seront vigilantes à ce que ce droit d'option (pour que les bénéficiaires de l’AAH puissent conserver le mode de calcul actuel si cela est plus favorable à leur foyer) repose sur des mécanismes ne créant aucun perdant, notamment pour les personnes devant renouveler leurs droits à l’AAH régulièrement », préviennent les associations. Et de réclamer une revalorisation du montant de l'allocation.

Créée en 1975, l'AAH est destinée à compenser l'incapacité de travailler. D'un montant maximal de 904 euros mensuels, elle est versée sur critères médicaux et sociaux. Elle compte aujourd'hui plus de 1,2 million de bénéficiaires, dont 270 000 en couple, pour une dépense annuelle d'environ 11 milliards d'euros.

*Aides, APF France Handicap, ASEI, CFPSAA, Collectif Handicaps, FFDys, Fisaf, FNATH, France Assos Santé, Ligue des droits de l’Homme, Santé Mentale France, Sidaction, Solidarité Sida, Unafam, Unanimes, Unapei, Uniopss et Voir ensemble.

C.G. (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr