Selon une étude de grande ampleur menée dans 27 pays et publiée dans « The Lancet », si les femmes adhèrent davantage que les hommes aux stratégies de prévention primaire, leur prise en charge est moindre dès lors qu'elles ont eu un premier événement cardio-vasculaire.
« Cette étude prospective de bonne qualité, signée par le Pr Salim Yusuf, une référence dans le domaine de la prévention, montre une tendance réelle à travers le monde », indique au « Quotidien » le Pr Ariel Cohen, cardiologue à l'hôpital Saint-Antoine (AP-HP) et président de la Société française de cardiologie.
L'étude PURE (pour Prospective Urban Rural Epidemiological) a inclus des individus de 35 à 70 ans provenant de 27 pays et de tous les continents (Asie, Afrique, Europe, Amérique et Moyen-Orient). Entre le 6 janvier 2005 et le 6 mai 2019, ce sont 190 414 adultes (59,7 % de femmes) sans antécédent cardiovasculaire et 11 658 adultes (54,4 % de femmes) souffrant de maladies coronariennes qui ont été recrutés. L'âge moyen était de 50,8 ans pour les femmes et de 51,7 ans pour les hommes, et la durée médiane de suivi était de 9,5 ans.
Selon Marjan Walli-Attaei, première auteure, cette étude « est la seule à avoir examiné les taux de létalité dans une cohorte qui inclut la mortalité pré-hospitalière, hospitalière et post-hospitalière associée à un événement aigu ».
Meilleur contrôle des facteurs de risque
L'incidence des maladies cardio-vasculaires (infarctus du myocarde, AVC, insuffisance cardiaque, décès d'origine cardio-vasculaire…) était plus faible chez les femmes que chez les hommes (4,1 versus 6,4 pour 1 000 personnes-années), tout comme la mortalité toutes causes confondues (4,5 versus 7,4 pour 1 000 personnes-années). Ce constat est certainement lié à un meilleur contrôle des facteurs de risque en prévention primaire chez les femmes (alimentation plus saine, arrêt du tabagisme…). « Les femmes sont plus adhérentes aux mesures qu'on leur transmet concernant le contrôle du cholestérol et du diabète, ajoute le cardiologue. On le constate au quotidien ».
Au contraire, les stratégies de prévention secondaire telles que les tests cardiaques et les procédures de revascularisation (intervention coronarienne percutanée et pontage coronarien) sont davantage réalisées chez les hommes que chez les femmes.
Malgré cela, le taux de récidive cardiovasculaire était plus faible chez les femmes que chez les hommes (20 versus 27,7 pour 1000 personnes-années), et le taux de mortalité à 30 jours après un événement cardio-vasculaire était également plus faible dans la population féminine (22 versus 28 %).
Écarts plus marqués dans les pays émergents
« Heureusement, cette prise en charge suboptimale des femmes n'aboutit pas à un surrisque cardiovasculaire, probablement parce que les femmes révèlent leur maladie coronaire plus tardivement, au moment où il n'y a plus d'imprégnation hormonale œstrogénique », avance le Pr Cohen. Et bien que les femmes aient tendance à consulter plus tardivement, leur meilleure hygiène vie joue sans doute en leur faveur.
« Il est intéressant de constater que ce phénomène de moindre accès à la prévention secondaire concerne toutes les régions du monde », souligne le cardiologue. Même si le phénomène est davantage prononcé dans les pays à faibles revenus, où les femmes ne sont que 14,8 % à avoir accès à la coronarographie contre 33 % des hommes, quand dans les pays à hauts revenus, les chiffres s'élèvent respectivement à 61,2 % et 73,4 %.
(1) M. Walli-Attaei et al., The Lancet, https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)30543-2, 2020.
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