Suicide à l'hôpital : une association de médecins dénonce un « harcèlement institutionnel généralisé »

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Publié le 13/09/2016
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Crédit photo : S. Toubon

Créée au printemps par trois PU-PH après le suicide d'un confrère cardiologue de l'Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, Assistance publique – Hôpitaux de Paris), l'association éponyme Jean-Louis Mégnien a tenu samedi dernier à Paris sa première assemblée générale devant un parterre d'une centaine d'adhérents, en grande majorité praticiens (et quelques infirmiers, agents, cadres hospitaliers et avocats spécialisés).

Mobilisée pour porter sur la place publique la problématique du harcèlement moral, de l'épuisement et de la souffrance des soignants et des personnels dans les hôpitaux, l'organisation a établi un lourd état des lieux, six mois seulement après sa création.

50 dossiers en cours d'examen

« Cinq infirmiers dans toute la France, un aide-soignant à Saint-Antoine (Paris), un agent à Adélaïde Hautval (Villiers-le-Bel), deux internes à Marseille et à Bordeaux et d'autres portent à une douzaine le nombre de décès d'hospitaliers depuis ce printemps, se désole le Pr Philippe Halimi, patron du service de radiologie à l'HEGP et président de l'association. Cette cascade de suicides, souvent commis dans des conditions de travail très dégradées, témoigne d'un problème de harcèlement institutionnel généralisé. »

L'association a entre ses mains une cinquantaine de dossiers « très documentés » d'hospitaliers qui se disent victimes de harcèlement sur leur lieu de travail. 90 % des plaintes émanent de praticiens, dont un tiers de PU-PH.

Selon nos informations, les dossiers témoignent notamment de mises au placard ou de mutations (sous couvert de recherche d'affectation) inappropriées, punitions utilisées par certains directeurs pour faire taire ou éloigner des médecins qui refusent de rentrer dans le rang en cas de nouvelle gouvernance ou de réorganisation de l'activité médicale.

« Cela peut arriver avec l'appui complice de praticiens que j'ose à peine appeler collègues, qui œuvrent pour leur cause personnelle, précise le Pr Halimi. Parfois, le point de départ de la situation de harcèlement est un conflit entre médecins, mais le directeur d'établissement ne se positionne pas toujours au-dessus de la mêlée. »

Créer un contre-pouvoir aux directeurs

L'association a l'intention de mettre en ligne dans les prochains jours sur son site Internet (en cours de construction) une carte nationale des hôpitaux « harceleurs ». « Nous ne sommes pas dans une logique de diffamation, nous voulons alerter le plus possible le public et les autorités, insiste le Pr Halimi. Il faut introduire des modifications réglementaires et législatives pour opposer un contre-pouvoir aux directeurs ».

À ce titre, les médecins espèrent rencontrer prochainement Marisol Touraine. Cette dernière a récemment réaffirmé qu'elle ferait des propositions pour lutter contre les risques psychosociaux à l'hôpital, sur la base des travaux menés par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).


Source : lequotidiendumedecin.fr