En 2017, pour la première fois depuis dix ans, les indicateurs de consommation du tabac étaient en net recul par rapport aux données de 2014 : 59 % des adolescents ont déclaré avoir déjà essayé un produit du tabac quel qu’il soit, un chiffre en baisse de neuf points. Pour le tabagisme quotidien, la baisse était moins marquée mais restait significative : un quart des adolescents ont indiqué fumer tous les jours, contre un tiers en 2014. Peu d’évolution en revanche sur le taux d’expérimentation de la cigarette électronique : 52,4 % contre 53,3 % trois ans auparavant. Selon les données de l’enquête ESCAPAD (1) portant sur près de 40 000 répondants, 1,9 % des jeunes de 17 ans utilisaient l’e-cigarette quotidiennement. Plusieurs facteurs étaient associés à cet usage (risque multiplié par trois) : tabagisme quotidien, expérimentation de la chicha et du cannabis dans l’année et consommation d’alcool récente et régulière.
Ainsi, l'expérimentation de l’e-cigarette est très répandue à 17 ans, mais son usage régulier reste limité et associé le plus souvent à un tabagisme quotidien. « En consultation, certains jeunes rapportent toutefois utiliser des liquides contenant du cannabis ou des dérivés cannabinoïdes ainsi que la JUUL, cigarette électronique en forme de clé USB et donc très discrète », selon la Dr Anne-Laurence Le Faou, responsable du Centre ambulatoire d’addictologie de l’HEGP à Paris. Cet usage détourné a été à l’origine de l’épidémie de pneumopathies aux États-Unis qui, à la date du 16 janvier, a concerné 2 668 personnes et entraîné 60 décès. Les liquides étaient dans 75 à 80 % des cas fabriqués ou achetés hors du commerce officiel et contenaient des huiles de cannabis, du cannabis synthétique et de l’acétate de vitamine E, produits formellement interdits dans les liquides pour cigarettes électroniques en Europe. En France, la Société francophone de tabacologie associée à la Société de pneumologie de langue française recommandent de n’utiliser que les liquides commercialisés, et de pas utiliser des huiles de cannabis ou d’autres produits non commercialisés.
Pour l’alcool, selon les données de cette même enquête ESCAPAD, une consommation régulière était rapportée par 8,4 % des jeunes de 17 ans en 2017, en baisse par rapport à 2014 (12,3 %), avec toujours une nette différence entre les garçons (12 %) et les filles (4,6 %). Quelque 44 % des jeunes de 17 ans ont déclaré avoir eu au moins une fois dans le mois précédent une alcoolisation ponctuelle importante (API, au moins cinq verres en une seule occasion), chiffre lui aussi un peu en baisse par rapport à 2014. Les API répétées (au moins trois épisodes au cours du mois) ont également diminué (16,4 % versus 21,8 % en 2014). Une évolution à la baisse est aussi observée pour le cannabis, même si 39 % des adolescents de 17 ans en ont déjà fumé (contre 48 % en 2014).
Des facteurs de risque
Certains facteurs sont associés à ces consommations : stress précoce ou chronique, précocité des consommations, première expérience positive, qui peut favoriser les consommations régulières et potentiellement l’installation d’une dépendance. Il est par exemple établi que commencer à boire de l’alcool au début de l’adolescence multiplie par dix le risque d’alcoolodépendance à l’âge adulte. Des prédispositions génétiques peuvent rendre certains individus plus vulnérables aux troubles liés à l’usage des substances addictives, notamment aux troubles psychotiques associés à l’usage de cannabis. Sans oublier l’effet marketing des nouvelles boissons alcoolisées, spécifiquement conçues pour plaire aux plus jeunes et associées dans les publicités et sur les réseaux sociaux à la fête, au sport et la séduction.
Quelles peuvent être les mesures de prévention ?
La meilleure connaissance des produits et de leurs risques ainsi que de ses propres limites sont des facteurs de protection. Or, les jeunes ont souvent des idées fausses sur les produits, émanant de leurs pairs mais aussi des adultes.
Un entourage familial favorable, des parents au fait des activités de leurs enfants, sont des facteurs de prévention des conduites addictives. À l’inverse, l’exposition aux produits psychoactifs dans le cercle familial ou de sociabilité est un facteur de risque de consommation de ces produits.
Il est essentiel de continuer à mener des enquêtes sur les consommations des jeunes afin d’en suivre l’évolution et adapter les messages de prévention.
D’après un entretien avec la Dr Anne-Laurence Le Faou, centre ambulatoire d’addictologie, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
(1) ESCAPAD : enquête nationale réalisée par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) lors de la Journée défense et citoyenneté (JDC), en partenariat avec la Direction du service national et de la jeunesse
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