La Haute Autorité de santé (HAS) maintient sa recommandation du 19 mars dernier de réserver le vaccin anti-Covid Vaxzevria de AstraZeneca aux plus de 55 ans, dans un avis rendu le 12 mai, en réponse à une saisine de la Direction générale de la santé, qui s'interrogeait sur la possibilité d'élargir la population cible aux moins de 55 ans.
« Au-delà de 55 ans, les risques de la vaccination diminuent fortement tandis que les bénéfices associés à la protection vaccinale croissent de façon significative », résume la HAS, qui a réévalué la balance bénéfice-risque à partir des nouvelles données, et notamment des travaux du Comité scientifique temporaire « Vaccins Covid-19 et thromboses atypiques rares » animé par l'Agence nationale de sécurité du médicament, et d'une analyse de l'Agence européenne du médicament (EMA).
Une balance bénéfice/risque variable selon plusieurs facteurs
Si l'utilité collective du vaccin Vaxzeria est « incontestable » pour freiner la dynamique de l'épidémie, elle doit être « mise en regard de chaque situation individuelle en prenant en compte le bénéfice à être vacciné et les risques d'effets indésirables, très rares mais graves », explique la HAS dans son avis.
« La balance bénéfice/risque individuelle absolue (indépendamment des alternatives et de l’impact direct sur le bénéfice collectif par le contrôle épidémique) des vaccins à plateforme adénovirale reste positive (...). Le bénéfice est particulièrement marqué dans les populations les plus âgées tandis que pour les populations les plus jeunes, les discussions conduisent à maintenir une réserve sur leur inclusion dans les cibles vaccinales au vu du risque de complication liée à une thrombose avec thrombopénie et du bénéfice individuel attendu plus limité », détaillent les experts de l'ANSM.
En Europe, la majorité des États membres assortissent la recommandation d'utilisation du Vaxzevria d'une limite d'âge, mais celle-ci varie selon les pays : 30 ans en Grèce, 40 ans au Royaume-Uni, 65 ans en Suède ou en Finlande. Certains pays ont même renoncé à son utilisation, comme la Norvège ou le Danemark.
Pour fixer un seuil à 55 ans, la HAS s'est appuyée en partie sur les conclusions de l’EMA publiées le 23 avril qui mettent en regard les bénéfices du vaccin estimés en termes d’hospitalisations, d’admissions en réanimation et de décès évités avec les risques de syndrome de thrombose avec thrombocytopénie (TTS) en fonction des différentes tranches d’âge et selon trois niveaux de circulation du virus (bas/moyen/haut). Il ressort notamment que la balance varie très nettement en fonction de la situation épidémique de chaque État. Pour la France, il est clairement positif au-delà de 40 ans, voire de 30 ans.
Mais la HAS a aussi tenu compte d'autres paramètres, comme l'offre alternative de vaccins à ARNm et la faible acceptabilité du produit d'AstraZeneca. Elle s'est enfin fondée sur les modélisations menées par l’unité de modélisation mathématique des maladies Infectieuses de l’Institut Pasteur selon lesquels « c’est à partir de 50-55 ans que les risques de thromboses atypiques (TTS) diminuent fortement tandis que les bénéfices associés à la protection vaccinale (hospitalisations, décès évités) commencent à croître de façon significative », lit-on.
Statu quo également pour le Janssen
La HAS considère qu'il n'y a pas lieu en l'état actuel des connaissances de modifier la limitation similaire du recours au vaccin de Janssen aux plus de 55 ans. « Compte tenu des similitudes rapportées concernant les cas de TTS observés après la vaccination par Vaxzevria et le vaccin Covid-19 Janssen, l’hypothèse d’un rôle physiopathologique commun des vecteurs adénoviraux semble probable. Toutefois, les données disponibles à ce jour ne permettent pas d’extrapoler sur une équivalence en termes de fréquence de risque de thrombose atypique par tranche d’âge », explicite la HAS. Tout en soulignant les atouts du Janssen : il peut être administré en une seule dose et être efficace face à certains variants préoccupants (« variants of concern »).
De son côté, l'ANSM invite les professionnels de santé à être attentifs aux signes et symptômes évocateurs de thrombose associée ou non à une thrombopénie chez les personnes vaccinées par les vaccins Vaxzevria (AstraZeneca) et Janssen.
Ces thromboses rares atypiques ont été observées de 4 à 28 jours après la vaccination. Elles seraient provoquées par une réaction auto-immune liée à la présence d’anticorps dirigés contre une protéine des plaquettes (le facteur plaquettaire 4/FP4) et se caractérisent par :
- une thrombose veineuse et/ou artérielle (quelle que soit la localisation) associée à une diminution des plaquettes (< 150 G/L) ;
- des thromboses veineuses et/ou artérielles de siège inhabituel (localisation, contexte clinique, éventuellement multi-sites, parfois successives), en particulier thrombose veineuse cérébrale et thrombose veineuse splanchnique.
Un traitement anticoagulant par des alternatives à l’héparine doit être alors privilégié, en raison des réactions similaires connues de l’héparine avec le facteur plaquettaire 4 et une recherche de la présence dans le plasma d’anticorps anti-FP4 devra être réalisée en parallèle, de préférence par un test Elisa adapté.
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