Les maladies respiratoires chroniques de l’enfant telles que l’asthme représentent un problème majeur au niveau mondial. Toutefois, la prévalence de l’asthme varie grandement en fonction des continents, des pays et des régions. Cela a parfaitement été montré par les études internationales comme l’ISSAC (International Study of Asthma and Allergy in Childhood). Le niveau de revenus, l’accès aux soins et les facteurs environnementaux jouent en effet un rôle important, tout comme le statut migratoire. En 1999, l’effet protecteur de la migration avait été montré chez des enfants d’origine turque de la deuxième génération élevée en Allemagne : dans ce groupe d’enfants, la prévalence de l’asthme était moindre que chez leurs pairs allemands et que chez les enfants turcs vivant en Turquie. Pour expliquer cette différence, l’une des hypothèses avancées à l’époque se fondait sur le concept de sélection : les individus ayant migré pour travailler en Allemagne étaient a priori en bonne santé.
Mais l’un des éléments essentiels, mal pris en compte au moment de cette analyse datant de la fin des années 90, était que ces familles ayant migré provenaient majoritairement de régions rurales de la Turquie, et avaient donc été exposées à une plus grande diversité microbienne, dont le rôle protecteur a depuis été démontré.
De façon intéressante, la prévalence de l’asthme chez les enfants d’origine turque vivant en Allemagne a augmenté au fur et à mesure de l’adoption du mode de vie du pays hôte. Un phénomène similaire a été observé à l’occasion de la réunification allemande, la prévalence de l’asthme chez les enfants originaires de l’Est ayant rattrapé celle de l’Ouest en seulement une génération.
Une protection transitoire
Comme le rapporte le Pr Michael Kabesch (Regensburg, Allemagne), d’autres facteurs peuvent expliquer les différences observées entre populations migrantes et indigènes, notamment des interactions gènes-environnement et des modifications épigénétiques. Les connaissances actuelles sur l’impact de la migration sur les maladies respiratoires sont essentiellement basées sur des données observationnelles ; pour le Pr Kabesch, il paraît difficile de les transposer aux populations ayant migré récemment, en provenance d’Afghanistan, de Syrie, d’Érythrée ou du sud de l’Afrique, dont les caractéristiques génétiques, culturelles et sociales sont très diverses. Pour le spécialiste allemand, il faudrait faire des études spécifiques sur ces populations, mais une telle démarche se heurte pour l’instant à de nombreux écueils : problème de langue, peu d’envie de participer à des études cliniques, souvent par crainte d’être finalement expulsé, et forte mobilité de ces populations. « Il s’agit pourtant d’un enjeu majeur si l’on veut améliorer la santé de ces enfants », estime le Pr Kabesch.
Présentation du Pr Michael Kabesch, Regensburg, Allemagne
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