Pneumologie

BPCO : pourquoi dépister ?

Publié le 24/03/2017
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Méconnue des patients malgré sa prévalence, la BPCO reste longtemps silencieuse. Même si elle est irréversible, le diagnostic permet une prise en charge adaptée qui améliore la qualité de vie et le pronostic.

J’EXPLIQUE

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie respiratoire chronique définie par une obstruction progressive, permanente et irréversible des voies aériennes.

• La BPCO se caractérise aussi par des manifestations extra-respiratoires caractérisées par la présence d’une inflammation, d’une altération de l’état nutritionnel, de modifications des muscles squelettiques et respiratoires, d’une fréquence accrue d’ostéoporose et de maladies cardio-vasculaires, ainsi que de manifestations neuropsychiatriques.

• 3 à 4,5 millions de Français souffrent de BPCO, et 1 sur 3 seulement est diagnostiqué. Seule la moitié des patients diagnostiqués est traitée.

• Le tabagisme (actif, +/- associé au cannabis , mais aussi le tabagisme passif) est responsable d’au moins 80 % des cas : 17 à 50 % des fumeurs développeront une BPCO en fonction de la durée de leur tabagisme et de leur susceptibilité individuelle.

• Le risque de développer une BPCO est multiplié par 2 à 3 en cas d’exposition professionnelle et/ou domestique à des toxiques ou irritants (silice, poussières de charbon ou végétales, moisissures).

JE MONTRE

J’INFORME

• Le patient BPCO reste longtemps asymptomatique.

• Le diagnostic doit être évoqué devant une toux et expectoration chronique (> 2-3 mois), une dyspnée progressive persistante apparaissant ou s’aggravant à l’effort ou au décours d’une bronchite. Attention, les patients ont tendance à banaliser leurs symptômes, attribuant, par exemple, leur dyspnée au manque d’exercice ou au vieillissement.

• Les symptômes sont souvent tardifs, et il ne faut pas attendre leur apparition pour évoquer une BPCO. Par ailleurs, l’absence de bronchite chronique n’exclut pas une BPCO : 26 à 90 % des patients authentiquement BPCO n’auraient pas de symptômes de bronchite chronique.

• L’évolution est volontiers émaillée d’exacerbations (2,7/an en moyenne pour les BPCO modérées). Il n’est pas rare que le diagnostic soit porté devant une exacerbation. Les patients souffrant d’au moins deux exacerbations annuelles ont une mortalité augmentée de plus de 50 % par rapport aux patients sans exacerbation. La répétition
des exacerbations accélère le déclin du VEMS.

• Il faut penser à la BPCO chez un homme ayant fumé ≥ 20 paquets-année et chez la femme à partir de 15 paquets-année. Il n’y a pas d’âge « minimal » requis pour dépister : on peut avoir une BPCO avant 40 ans.

JE PRESCRIS

• Une spirométrie. Le diagnostic de BPCO est spirométrique : rapport VEMS/CVF < 70 % après administration d’un bronchodilatateur.

• L’arrêt du tabac. Le sevrage réduit la vitesse du déclin annuel du VEMS, améliore les symptômes, diminue le risque d’exacerbation et augmente la survie.

• Une fois la BPCO diagnostiquée, la prescription médicamenteuse est individualisée selon le profil du patient. Les traitements améliorent le VEMS, la dyspnée, la qualité de vie, le risque d’exacerbation.

• La vaccination anti-grippale annuelle et anti-pneumococcique.

• Un « nettoyage de l’ordonnance » : les anti-tussifs sont formellement contre-
indiqués car ils altèrent le drainage des sécrétions. Les sédatifs (anxiolytiques, hypnotiques) sont également à proscrire car ils perturbent la commande respiratoire centrale et le réflexe de toux. Les causes iatrogènes d’exacerbations sont fréquentes. 

J’ALERTE

• Il existe des questionnaires et autoquestionnaires recherchant les symptômes. Ils sont imparfaits, d’une part par le manque de spécificité des symptômes (de l’ordre de 25 %), d’autre part car ils peuvent être faussement rassurants en l’absence de symptômes (sensibilité de 70-80 % au plus). Cependant, ils retrouvent généralement davantage de symptômes que la plainte spontanée des patients (pour la dyspnée : 69 % avec le questionnaire vs 34 % de plainte spontanée  ; 63 % vs 37 % pour la toux ; 54 % vs 15 % pour les bronchites…).

• La mesure du débit expiratoire de pointe est mal corrélée au VEMS. Elle n’est donc d’aucune utilité dans le dépistage de la BPCO voire faussement rassurante dans les BPCO débutantes qui atteignent les voies aériennes distales avant de progresser vers les segments les plus proximaux du spirogramme et, finalement, amputer le VEMS.
Les mini-spiromètres (PIKO-6®, etc.), dont l’usage a été promu il y a quelques années, ne sont que des outils de débrouillage et d’orientation nécessitant une formation préalable.

JE RENVOIE SUR LE WEB

www.bpco-asso.com (Association BPCO : fiches pratiques en libre accès).

Dr Julie Van Den Broucke (médecin généraliste, Paris). Bibliographie disponible sur legeneraliste.fr

Source : Le Généraliste: 2790