LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : La conférence des doyens estime que le consentement du patient anesthésié n’est recueilli que dans 67 % des examens pelviens chez les étudiants de premier cycle et dans 80 % des cas en deuxième cycle. Partagez-vous ce constat ?
SÉBASTIEN FOUCHER : La méthodologie de cette enquête nous semble contestable et aboutit à des résultats qui sont loin de la réalité. Selon nos chiffres, on est plus proche de la barre des 10 %, voire en dessous. Pratiquer des touchers pelviens sur des patients anesthésiés sans avoir leur consentement est inacceptable. Mais il ne faut pas tomber dans une autre polémique qui serait : « Il faut se méfier des étudiants en médecine. » Les étudiants sont concernés par le patient et par l’éthique. On ne leur donne pas les outils pour appliquer le peu d’éthique qu’ils apprennent.
Comment apprenez-vous aujourd’hui les touchers pelviens ?
Sauf dans les quelques facs qui ont des centres de simulation, les étudiants apprennent ces gestes à l’hôpital, au gré des stages, dans la majorité des cas sur des patients endormis ayant été prévenus ou éveillés. Ce sont toujours des opérations concernant la sphère gynécologique ou urologique, où l’on apprend à palper les structures et à repérer avec le senior les situations pathologiques. Je n’ai jamais eu de remontée de cas où une patiente opérée de l’épaule aurait subi un toucher pelvien.
Cet apprentissage « sur le tas » pose problème. Parfois l’étudiant se retrouve face à un patient endormi, il n’a pas forcément assisté à la consultation pré-opératoire, on n’est pas sûr qu’il y ait consentement. Mais on se dit que c’est peut-être la seule fois où on pourra faire cet acte. Alors on y va, et l’éthique passe au second plan.
Les seniors vous parlent-ils d’éthique ?
Ce serait réducteur d’affirmer que les praticiens ne sont pas concernés par l’éthique. Mais au bloc, leur préoccupation est avant tout de nous enseigner la clinique et la technique. Il n’y a aucune volonté de mal faire ni de dire : « le corps de cette patiente m’appartient et je fais ce que je veux ». Mais certains n’ont peut-être pas assez anticipé le changement culturel et la fin d’une médecine paternaliste.
Globalement, on nous parle trop peu d’éthique à la fac, au-delà des cours magistraux sur ses principes et son histoire en première année. Ce n’est pas la hauteur des enjeux de notre pratique et des attentes des patients.
La simulation médicale est-elle l’avenir de la formation ?
Les laboratoires de simulation permettent de s’entraîner sur des mannequins en ne pensant qu’à la technicité du geste. Une fois à l’hôpital, l’étudiant est libéré de la technique, il n’a pas peur de passer à côté d’une des rares occasions de s’exercer, et il peut donc se concentrer sur le patient. Ou refuser l’acte si les conditions éthiques ne sont pas réunies.
En outre, la simulation garantit le systématisme. On s’assure que toute une promotion a déjà pratiqué un toucher pelvien au moins sur un mannequin, alors qu’aujourd’hui, c’est très dépendant des stages effectués.
On ne peut pas pour autant se passer de la pratique ne serait-ce que pour cerner les aspects humains. La simulation permet de la rendre plus pédagogique. Avec l’ouverture du numerus clausus, sans adaptation des capacités de formation, le nombre de gestes que chaque étudiant peut pratiquer a diminué. Il est donc crucial de préparer notre passage à l’hôpital pour en profiter le plus possible.
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