NOMMÉ INTERNE des hôpitaux de Paris en 1938, à 22 ans, Jean-Claude Dreyfus est démobilisé en 1940. Dès cette année, les lois promulguées par Vichy ou par l’occupant allemand contraignent le jeune médecin à passer de Paris à Bugue, en Dordogne, où ses parents se sont réfugiés, de Lyon à Toulouse, de Rouen à Annecy.
Entre zone libre et zone occupée, Jean-Claude Dreyfus peine à trouver sa place, se réfugiant d’abord dans le travail avant de devoir se cacher sous une fausse identité. Son récit permet de prendre toute la mesure de ce que fut la vie quotidienne des « israélites français » dans ces années noires, de comprendre ce qui fut d’abord vécu comme une profonde déstabilisation avant d’être compris comme un réel danger.
Sans accusation, tout en finesse, le récit de ce jeune étudiant sérieux témoigne de la sécheresse et de la lâcheté de quelques collègues trop heureux de voir disparaître certains rivaux, de la générosité d’un petit nombre d’autres, de la solidarité des paysans de Dordogne. Il raconte aussi le sentiment de vacuité engendré chez ce jeune médecin dynamique par une marginalisation aussi absurde que brutale, la solitude, la peur croissante, et constitue une photographie instructive de ce qu’était la médecine hospitalière sous l’occupation.
Il rappelle aussi la chronologie des lois d’exclusion des juifs et la puissance de l’antisémitisme d’État sous l’occupation. En 1940, celui qui deviendra professeur de biochimie à Cochin après la guerre n’est alors qu’un jeune homme suivant avec quelques amis juifs l’évolution du front russe et les progrès ou les défaites de l’armée allemande et se demandant comment « ménager l’avenir ».
Mais assez vite, et par la force des choses, sa conscience du danger se fait plus aiguë et, même si le jeune médecin peine à l’accepter, la réalité est brutale. Sa situation devient en effet de plus en plus critique au fil des mois et, en 1942, il est renvoyé de l’internat des hôpitaux de Paris par décret de l’état français. Il se réfugie alors à Lyon, où il est accueilli avec un collègue, Georges Schapira, dans le laboratoire du Pr Gabriel Florence. Il y restera quelques mois avant d’être arrêté en décembre 1943 et déporté, au retour d’une petite parenthèse d’insouciance en montagne : « C’est dans l’espoir de revivre des vacances du même genre que je revins en décembre pour passer dans la famille la fin de l’année. Mais c’est un destin tout autre qui m’attendait. » Il raconte sa déportation dans « Souvenirs lointains de Buchenwald et Dora 1943-1945 ».
Jean-Claude Dreyfus, « le Médecin juif errant 1940-1943 », La cause des livres, 78 pages, 8 euros.
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