L'union fait la force et l'Université cherche à traduire ce credo dès les études médicales.
Réunis fin septembre à l'occasion du grand colloque « Médecine, santé et sciences au cœur de la société », à l'initiative de la conférence des doyens, les étudiants en santé et les internes ont insisté sur la nécessité de multiplier les enseignements théoriques et les modules pratiques en commun avec les autres professions du secteur de la santé.
À l'heure où la CNAM a entamé un round de négociation interpro pour accélérer précisément le développement des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et des équipes de libéraux, les jeunes aspirent à passer à la vitesse supérieure dès la formation initiale. Le constat est simple : médecins, pharmaciens, infirmières, sages-femmes, kinés, personne ne connaît le métier de l'autre et les filières restent trop cloisonnées. « On ne sait pas ce qu'ils font ! Quels sont leurs champs d'exercice et quelles sont leurs limites ? », résume Jeanne Dupont-Deguine, vice-présidente de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF).
Simulation et relationnel
Certes, le service sanitaire lancé en 2018, qui permet aux différentes promotions de travailler sur un projet de prévention pendant quelques semaines en 3e ou 4e année de fac, est un premier pas, mais de l'avis général il faut aller plus loin.
Les carabins proposent qu'un référentiel de compétences de tous les métiers soit intégré aux cours de premier cycle. Autre piste : mutualiser certains enseignements entre sages-femmes, médecins et infirmiers – comme la contraception.
La jeune génération plébiscite l'apprentissage par simulation, permettant de coopérer à partir de scénarios fictifs. « Il faut que ce soit pertinent et proche des conditions d'exercice réelles comme à l'hôpital, souligne Jeanne Dupont-Deguine. Il faut travailler les compétences à la fois techniques mais surtout relationnelles, complètement oubliées. Ces mises en situation permettraient de savoir mieux travailler ensemble et d'améliorer la prise en charge. »
Chez les internes en médecine générale, quelques exemples de pratique interpro ont déjà fleuri. En Centre-Val de Loire, face au manque de maîtres de stage en gynécologie médicale, les internes ont l'autorisation de réaliser un stage mixte chez une sage-femme. « On découvre leur exercice, leurs savoirs en gynécologie mais aussi leur manière de communiquer avec leurs patients, différente de la nôtre », salue Morgan Caillault, président de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). Toujours à l'internat, la fac de Tours a organisé des « cours de pratique », l'équivalent des groupes de pairs, mais cette fois-ci entre internes de médecine générale et futures sages-femmes. Des séquences où les juniors échangent autour d'un cas pratique et cherchent une solution collective.
Scénarios inédits
L'Université a son rôle à jouer dans la promotion de l'interdisciplinarité. Selon le Pr Bach-Nga Pham, vice-présidente de la conférence nationale des doyens de médecine, « l’Université doit enseigner et promouvoir un système de santé décloisonné entre les différents types de métiers, multidisciplinaire et interprofessionnel ». Isabelle Derrendinger, directrice de la structure de formation en maïeutique du CHU de Nantes, appelle à repenser les modèles pédagogiques. « La pédagogie médicale ne se centre plus sur un seul métier, celui du médecin, mais sur des métiers. Elle se recompose en des scénarios inédits comme le déploiement de la simulation in situ ».
Diffuser la culture de l'interpro ne signifie pas soutenir des transferts de tâches à la hussarde. Le Dr Paul Frappé, président du Collège de médecine générale (CMG), pointe certaines expérimentations au titre de l'article 51 de la loi Sécu pour 2018. « Nous voyons passer des protocoles qui proposent que des kinés fassent des arrêts de travail. Il faut prendre garde à ne pas rendre le système de santé illisible en niant le rôle de chacun dans une logique simpliste ».
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