Après l'in vivo et l'in vitro, entrons-nous dans l'ère de l'in silico ? C'est en tout cas ce que le Parlement et la commission européenne appellent de leurs vœux.
Référence au silicium des transistors utilisés dans les ordinateurs, l'in silico consiste à utiliser (pour une recherche ou un essai) un programme informatique pour recréer par modélisation un phénomène physique afin d'anticiper d'éventuelles complications. Très employé dans l'aéronautique et le nucléaire, ce type de « crash test virtuel » se développe peu à peu dans les hôpitaux universitaires, en parallèle à la recherche en laboratoire et aux essais cliniques, avec un cadrage hétérogène de la part des autorités nationales.
La semaine dernière, des parlementaires européens ont jeté les bases d'une feuille de route politique à l'horizon 2020, nourrie par les travaux d'Avicenna alliance, un groupe de 525 experts (industriels et universitaires de 35 pays) missionnés par la commission européenne en 2013. « La simulation numérique possède un énorme potentiel pour la santé, a jugé Nicola Caputo, député socialiste italien, lors d'une conférence de travail au Parlement. Il faut la promouvoir dans les blocs opératoires, pour les traitements médicamenteux personnalisés et en prévention des pathologies chroniques ».
Patients virtuels
La simulation numérique en santé prend son sens à deux niveaux : dans la conception des dispositifs médicaux et des médicaments. À Sheffield, en Grande-Bretagne, une équipe de cardiologues utilisent par exemple la simulation numérique pour modéliser des artères coronaires et tester virtuellement la juste pose et taille de stents avant toute opération invasive.
En France, le Dr Mathieu de Seze, spécialiste en médecine physique et réadaptation au CHU de Bordeaux, utilise un programme de modélisation sur la transformation de la scoliose chez les adolescents. Le médecin étudie via ordinateur l'efficacité des corsets en pratiquant différentes tensions virtuelles sur le dispositif médical afin de tester sa capacité de résistance et réduire la variabilité de l'effet du corset sur la pathologie du jeune patient. Auparavant, le Dr de Seze avait la radio comme seul outil. « J'ai utilisé la simulation numérique pour quelques dizaines de patients depuis septembre, témoigne-t-il. C'est un gain d'efficacité certain ! » Et économique ? Trop tôt pour le dire, évacue le praticien.
Outre-Atlantique, l'agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (la FDA) va plus loin en développant un programme de patients virtuels de dix modèles et plus de 200 organes et tissus cellulaires afin d'anticiper de façon globale la façon dont le corps humain réagit à telle pathologie, molécule ou tel dispositif médical.
Faire sauter les barrières
Pour que l'Europe rattrape son retard, Avicenna alliance préconise la création d'une instance de régulation supranationale. « La technologie existe et les professionnels sont prêts à s'en saisir, mais le grand problème reste les pouvoirs publics, assure Thierry Marchal, directeur industriel du logiciel de simulation numérique Ansys et membre du groupe d'experts. Maintenir des règles nationales relève de l'absurdité. Il faut faire sauter les barrières si l'on veut démocratiser la simulation numérique ». Pas si simple… « Si vous montrez aux politiques comment gagner de l'argent avec la simulation numérique, ils vous suivront ! », explique, pince-sans-rire, Seán Kelly. Pour travailler à la construction d'un environnement législatif européen, l'élu chrétien-démocrate irlandais appelle les experts à continuer à récolter des preuves de l'intérêt de la simulation numérique afin d'avoir une « success story » à présenter aux députés européens en 2020.
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