Entretien

Olivier Le Pennetier, président de l'ISNI : « Si on juge que des internes n'ont pas le niveau, la vraie question est : pourquoi ? »

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Publié le 02/02/2017
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PENNETIER

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LE QUOTIDIEN : Comment abordez-vous la problématique des internes incompétents ?

OLIVIER LE PENNETIER : Nous ne parlons pas d'internes "incompétents". Il y a des insuffisances professionnelles, parfois, mais pas d'incompétence. Si on juge que certains internes n'ont pas le niveau, la vraie question est : pourquoi ? Ne faudrait-il pas remettre en cause la formation, si celle-ci n'est pas optimale, au lieu d'accabler les internes ? La réforme du 3e cycle devrait être un élément de réponse avec une augmentation du suivi et du compagnonnage…

Qu'attendent les internes du nouveau portfolio ?

Le portfolio s'articulera autour d'objectifs pédagogiques définis pour chaque diplôme d'études spécialisées (DES), inclus dans chaque maquette de spécialité. Ces objectifs serviront à passer d'une phase à l'autre, c'est pourquoi les internes attendent qu'ils soient correctement définis. Ils souhaitent aussi connaître avec précision à quel stade de la formation chaque compétence devra être acquise. Nous serons vigilants sur la définition et le nombre d'objectifs demandés à l'interne. Pour l'instant, la concertation avec les acteurs est difficile.

Dans certaines facultés françaises, notamment en médecine générale, le portfolio numérique a déjà été mis en place, mais de façon hétérogène, afin de fluidifier le suivi des internes car c'est la spécialité où ils sont le plus nombreux. Il permet de mieux organiser l'apprentissage ! Les enseignants ont souhaité harmoniser cet outil pour toutes les autres spécialités. En pratique, certaines d'entre elles utilisaient déjà des systèmes similaires – c'est le cas pour la chirurgie avec par exemple l'acquisition des bases anatomiques de chirurgie.

Quels avantages concrets apportera le recours au portfolio ?

L'un des avantages sera l'accès à des formations de qualité égale sur le territoire et mieux harmonisées. Cela mettra également fin à la course aux diplômes universitaires (DU) et inter-universitaires (DIU). Ils sont actuellement quasiment obligatoires à la formation. Or leur coût peut être onéreux pour les internes. En intégrant ces diplômes dans les objectifs de la spécialité, cela permettra de ne plus devoir s'y inscrire car ils seront dispensés dans le cadre du DES et considérés comme des nouvelles compétences à acquérir. Mais il y a des points négatifs : les internes sont inquiets du risque de "flicage" de leurs parcours par les enseignants ou des évaluateurs et donc de disposer de moins de liberté sur leur choix de stage et de formation.

Qu'est-il prévu si un interne ne valide pas les compétences attendues à l'issue d'une phase ?

Pour le moment rien n'est écrit. Il est difficile de parler de redoublement ou de réorientation ; nous serons attentifs aux propositions.

Il est prévu que les internes répondent à plusieurs critères pour passer à la phase suivante de leur formation. Une partie de l'évaluation sera réalisée par l'interne lui-même à travers le rendu de travaux permettant de faire le point sur les compétences acquises et les progrès attendus. Ils seront déposés dans le portfolio. L'autre partie de l'évaluation pourrait se dérouler sous la forme d'examens pratiques (des mises en situation par simulation par exemple) très demandés par les internes pour tester leurs compétences cliniques. 

Propos recueillis par Sophie Martos

Source : Le Quotidien du médecin: 9552