« Un étudiant en médecine bien formé doit savoir que dans 20 ans, tout ce qu’il a appris aura complètement changé, et nous sommes là pour lui apprendre à se remettre en question », résume le Pr Christian Bonah qui, à la fois médecin et historien, préside le département d’Histoire des sciences de la vie et de la santé (DHVS) de la Faculté de médecine de Strasbourg.
Fort de sept enseignants secondés par de nombreux doctorants, le DHVS est la plus grosse structure de ce type en France, mais d’autres facultés comme Lyon, Paris Diderot, Angers ou Montpellier ont recruté elles aussi des enseignants spécialisés en « humanités ». Ailleurs, ces formations sont souvent assurées par des professeurs de médecine dont ce n’est pas la discipline principale. C’était d’ailleurs déjà le cas à Strasbourg depuis plusieurs décennies, et c’est cette riche tradition en histoire de la médecine qui a poussé la Faculté à développer plus fortement l’histoire que d’autres champs des sciences humaines.
Échange et de dialogue avec le patient
D’autres grandes facultés francophones, comme celle de Montréal, mettent en avant la littérature, notamment parce qu’elle permet de « mieux comprendre le vécu des patients », explique le Pr Vinh-Kim Nguyen, médecin et anthropologue dont le département associe même les patients à l’enseignement des sciences humaines. Quelle que soit la forme que prennent ces enseignements, ils doivent tous aider les médecins à jeter un regard plus critique sur leur pratique comme sur leurs attitudes générales, notamment en matière d’échange et de dialogue avec le patient.
Dans la plupart des facultés, les cours de sciences humaines ont lieu lors des premières années de formation : plus tard, les étudiants sont beaucoup moins motivés pour cela. À Strasbourg toutefois, une historienne participe à la formation des internes en médecine générale en partenariat avec des médecins enseignants. Les sciences humaines sont d’ailleurs très prisées des futurs généralistes, beaucoup plus nombreux à consacrer leur thèse à des sujets « sociologiques » que les internes hospitaliers plus centrés sur le « biomédical ». Cet intérêt des internes pour ces sujets, encore plus grand chez les femmes que chez les hommes, implique donc aussi qu’ils aient été suffisamment formés aux méthodes d’étude de recherche, afin d’augmenter la valeur scientifique de leur travail.
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