Surcharge de travail, inégalités, ratés : c’est un rapport au vitriol qui a été présenté ce jeudi par les Fédérations étudiantes en santé (Anemf, Anepf, Anesf, FNEK et UNECD) et la Fédération générale des associations étudiantes (Fage) à propos de la réforme d’entrée en études de santé (REES), qui s’est mise en place dans la douleur depuis deux ans.
« Pédagogie oubliée, santé mentale en danger, organisation balbutiante… » : l’entrée dans les filières sélectives Médecine, Maïeutique, Odontologie, Pharmacie, Kinésithérapie (MMOPK) s’est révélée tout sauf un long fleuve tranquille au sein des deux nouveaux cursus – PASS (parcours accès santé spécifique) et L.AS (licence généraliste avec une mineure santé) – qui ont remplacé l’ex-PACES depuis septembre 2020. Une réforme qui était pourtant censée diversifier les profils étudiants et mettre fin au gâchis humain du concours de fin d'année, en permettant aux étudiants de mieux rebondir en cas d’échec.
Double peine pour les étudiants L.AS !
La majorité des dysfonctionnements constatés dès le départ « persistent », déplorent les fédérations après une nouvelle enquête dans 36 universités, dénonçant un « suivi approximatif » de la réforme.
C’est d’abord l’organisation du parcours des licences avec accès santé (L.AS) qui cristallise l’essentiel des critiques estudiantines. Alors que cette voie d’accès avait été pensée pour diversifier les profils de carabins voulant embrasser une carrière médicale ou paramédicale – et sortir de la sélection par les maths – dans les faits, les L.AS se retrouvent être les parents pauvres de l’entrée dans les filières sélectives MMOPK. « Ces L.AS sont très souvent des licences classiques… avec des modules ajoutés », fustige la FAGE.
Ce qui crée, à l’arrivée, une surcharge de travail pour ces étudiants qui doivent non seulement valider les 60 ECTS (système européen de transfert et d’accumulation de crédits) requis pour la validation d’une année universitaire, mais aussi les 10 ECTS supplémentaires de la mineure spécifique santé. Des étudiants en L.AS confrontés à une double peine, puisque la qualité de l’enseignement y serait moins bonne. Selon l’étude, 41 % des mineures santé se font exclusivement en distanciel, les étudiants de ce cursus ont trois fois moins d’enseignements dirigés qu’en PASS et deux fois moins de séances en groupe restreint.
Toujours une voie royale, la PASS…
Pour les représentants des cinq filières santé, la conclusion est sans appel. « Alors qu’aucune voie royale ne devrait exister depuis la réforme, la filière PASS est encore vue, dans les faits, comme telle ». Pas étonnant que le public étudiant des licences L.AS se sente délaissé par les universités. Un sentiment accentué par le fait que « 50 % des universités ne proposent pas de référents L.AS au sein de toutes les UFR hors santé ».
En dépit de la réforme, certaines filières souffrent toujours d’un manque d’attractivité. Ainsi, en 2023, « il y avait respectivement 10 % de places vacantes en maïeutique et 15 % en pharmacie », relèvent les associations étudiantes.
De surcroît, des inégalités demeurent entre UFR : 75 % des universités ne proposent toujours « qu'une ou deux modalités d'évaluation écrite », alors que la réforme devait les diversifier pour sortir du tout QCM. Le bachotage n’est donc pas terminé. La moitié des universités n'ont pas instauré non plus de comités de suivi de la réforme et 64 % n'y intègrent pas de représentation étudiante, déplorent-elles.
Lutte contre les prépas privées et consultation nationale
Autre dérive pointée, la montée en puissance des officines privées de préparation aux épreuves, vers lesquelles se tournent un nombre croissant de jeunes qui aspirent aux études de médecine, un frein majeur à l’égalité des chances. La Fage évalue ainsi à « 5 441 euros » le prix moyen d’une prépa privée en PASS.
Pour contrer ce phénomène de privatisation, les tutorats santé se sont certes développés dans toutes les universités. Montés par des étudiants bénévoles en année supérieure, ils proposent des services gratuits ou à prix coûtant afin de maintenir l’égalité des chances. Mais cette ambition repose aujourd’hui sur les associations étudiantes, « sans aucune prise de position nette du gouvernement, dont les fédérations attendent un soutien plus poussé », épingle le rapport.
Ces mêmes fédérations étudiantes en santé lancent, à partir de ce 29 février et jusqu’au 29 mars, un grand questionnaire en ligne auprès de toutes les personnes « qui passent ou sont passées par PASS, L.AS ou LSPS (Licence sciences pour la santé) ». Objectif de cette consultation : mesurer le ressenti des étudiants afin « de construire une contribution qui portera une vision d’évolution de cette réforme ». La restitution, attendue pour le mois d’avril, entend faire bouger les lignes en faveur du décloisonnement des études de santé et d’une réelle égalité des chances pour tous les futurs soignants.
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