À la veille de la session de rattrapage des premières épreuves dématérialisées nationales (EDN, qui représentent 60 % de la note finale de ces ECN nouvelle formule), les 16 et 17 janvier dans toute la France, le stress montait chez les étudiants concernés.
Sur les 8 162 externes de sixième année à avoir planché sur cette épreuve redoutée en octobre, ils sont au total plus d’u millier à ne pas avoir obtenu la note de 14/20 aux items de rang A – les connaissances à maîtriser impérativement à l'issue du deuxième cycle — et à être, de fait, versés en session de rattrapage. Cela représente au total un peu plus de 12 % de la promotion. « Ce n’est pas anodin. Au vu des épreuves blanches – où le taux d’échec était de 8 % – nous espérions être aux alentours de 10 %. Mais 12 % ce n’est pas non plus anormal », confie ce lundi au Quotidien le Pr Benoît Veber, président de la Conférence des doyens de médecine.
Promotion « crash test » ?
Pourtant, pour les carabins concernés, ces rattrapages génèrent énormément d’anxiété et de stress. Nombreux sont ceux à l’exprimer sur les réseaux sociaux, parfois relayés par leurs aînés.
Jérémy Darenne, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), juge ces inquiétudes légitimes. « La réforme du second cycle des études de médecine (R2C) s’est faite dans la précipitation, relate-t-il. Malgré le fait que les EDN aient été avancées en octobre de la sixième année contre juin auparavant, le programme n’a pas été allégé ! Les étudiants ont bénéficié de moins de temps pour réviser, ce qui peut expliquer qu’autant d’entre eux se retrouvent en rattrapage. Pour éviter de faire partie de cette promotion “crash test”, de nombreux étudiants de cinquième année ont d’ailleurs préféré redoubler ». L’an dernier, le taux de redoublement entre la cinquième année et la sixième était en effet passé de 2,5 % à 8 %.
Une réussite très variable selon les facultés
Autre sujet qui fâche : selon les facultés, le taux de réussite aux EDN d’octobre varierait du simple au triple. « À la faculté de Bobigny, 40 % des externes de sixième année n’ont pas obtenu la note de 14/20 et sont donc en rattrapage. A contrario, ce taux s’élève à 7 % à peine à la faculté de Toulouse », assure le président de l’Anemf.
Des disparités qui s’expliqueraient, toujours selon Jérémy Darenne, par des inégalités sur le plan de la formation. « Certaines facultés proposent des entraînements supplémentaires pour les EDN, je pense notamment aux épreuves inter-facultés gérées par les universités d’Île-de-France. Il existe aussi des différences de traitement au niveau de l’aménagement des stages. Certaines facs ne respectent pas le délai fixé à mi-juillet pour l’arrêt des stages car elles ont besoin d’externes pour faire tourner les hôpitaux. Conséquence ? Certains d’entre eux disposent de moins de temps pour réviser ! », dénonce Jérémy Darenne, pour qui le manque d’anticipation de la R2C a exacerbé ces inégalités.
Mais pour le Pr Benoît Veber, ces écarts de réussite dépendent avant tout du niveau réel des étudiants. « La population étudiante n’est pas la même d’une faculté à l’autre. Lorsqu’on est à Paris Sorbonne, on est dans un milieu extrêmement moteur pour travailler. Il y a certainement des facultés où ce moteur est un peu moins fort, analyse-t-il. Après, est-ce qu’il y a une différence au niveau de l’enseignement selon les établissements ? Ça, je ne peux pas vous le dire. Les doyens aspirent à obtenir les résultats des EDN mais ce n’est pas le cas car le centre national de gestion (CNG) ne nous les communique pas pour des raisons de sécurité des données. Pour y voir plus clair et tirer des conclusions, nous devons disposer de ces chiffres ! »
Rassurer les carabins
Toutefois, en ce qui concerne le niveau de difficulté des rattrapages à venir, le doyen des doyens se veut rassurant. « L’épreuve d’octobre mélangeait des connaissances de rang A et B, elle était probablement un peu plus difficile que celle qui sera proposée mardi et mercredi. Il faut que les étudiants soient sereins car, s’ils ont acquis les connaissances nécessaires, ils devraient assez facilement franchir cette étape et pouvoir se préparer ensuite aux Ecos (examens cliniques objectifs et structurés, deuxième grande étape pour l’accès à l’internat, NDLR) ».
Et de rappeler la vocation des EDN, qui vérifient la solidité du socle de connaissances requises. « Ces connaissances correspondent aux fondamentaux. Si un étudiant ne franchit pas cette barre des 14/20, c’est en quelque sorte une sécurité pour lui et pour ses futurs patients. Mieux vaut redoubler plutôt qu’être jeté dans le grand bain sans savoir nager au risque de se noyer… », illustre l’enseignant-chercheur.
Mais entre les carabins qui n’obtiendront pas la note convoitée de 14/20 et ceux qui rendront copie blanche au rattrapage (pour ne pas être mal classés cette année), le taux de redoublement devrait être cette année très important encore. « L’année dernière, 9 300 néo-internes ont choisi leur spécialité. En novembre, ce chiffre pourrait descendre à environ 8 000 », anticipe le Pr Veber.
En conséquence, la promotion suivante (2025) devrait être, elle, plus conséquente. « Autour de 10 000 ou 11 000 étudiants, évalue le président des doyens. C’est normal, c’est l’effet de la réforme, il y aura ensuite un lissage dans deux ou trois ans ». Reste à savoir si les capacités d’accueil seront, d’ici là, suffisantes pour accueillir les carabins et futurs internes.
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