Après les échanges de point de vue mercredi, l’heure était aux annonces ce jeudi.
La future quatrième année de médecine générale aura été le sujet phare de ces deux premiers jours du 22e Congrès du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) à Lille.
Le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, avait fait le déplacement et, pour l’occasion, la mission en charge de mener les concertations autour de cette quatrième année était venue présenter ses premières conclusions.
Le Pr Olivier Saint-Lary, président du CNGE mais aussi membre de la mission, s’en est fait le porte-parole, en présence des trois autres membres, Mathilde Renker et les Pr Stéphane Oustric et Nanou Pham.
Depuis la nomination de la mission, fin septembre dernier, ce sont une quarantaine d’auditions qui ont été menées avec des structures potentiellement impactées par l’évolution du DES.
Les représentants des étudiants et des internes ont été reçus en premier mais la mission a également rencontré les patients et usagers. Le Pr Saint-Lary a rappelé que la question clé était « le rôle et les missions que nous souhaitons conférer aux médecins généralistes de demain ».
Séminaire dédié à l'installation et la rémunération à l'acte
Avant même la mise en place de la mission, le comité de suivi du 3e cycle avait travaillé à la construction de la future maquette de cette quatrième année et un « solide consensus » avait été trouvé, a souligné le Pr Saint-Lary. Intégration d’un stage libre sur projet professionnel, la santé de la femme et de l’enfant au sein d’un stage couplé en ciblant mieux les besoins spécifiques à l’exercice ambulatoire, accompagnement au projet professionnel lors de la phase de consolidation…
À l’issue de ces 40 premières auditions, le rapport d’étape de la mission formule ses premières recommandations. Pour les formations dispensées pendant cette quatrième année, elle préconise comme thématique : la coordination des acteurs territoriaux et le travail pluripro, la gestion des outils de travail et l’environnement numérique, la continuité et la permanence des soins, la santé mentale et la psychothérapie et la santé environnementale. La mission suggère aussi pendant la phase de consolidation la mise en place d’un séminaire dédié à l’entrée dans la vie professionnelle « avec pour objectif de lever les freins administratifs à l’installation ».
Elle recommande aussi la mise en place d’un statut spécifique avec une rémunération comprenant une part variable, fixée en fonction des honoraires perçus « afin de leur permettre d’appréhender de manière très concrète la réalité de l’exercice ambulatoire actuellement très majoritairement libéral », a souligné le Pr Saint-Lary.
Consensus contre la coercition
Concernant un des points de crispation : la réalisation des stages en zones sous-denses ou non, « nous ne sommes pas naïfs du contexte, et nous connaissons les attentes fortes de la population », a déclaré le Pr Saint-Lary. Mais la position de la mission est claire, « aucune structure que nous avons rencontrée ne s’est prononcée en faveur de la coercition dans le cadre de la phase de consolidation », a-t-il annoncé. La mission préconise donc que le choix de stage se fasse à l’échelle de la subdivision, avec des possibilités de dérogations sur projets professionnels à l’instar de ce qui existe actuellement pour les stages Inter-CHU.
Il a rappelé que l’objectif de la réforme était pédagogique avant tout. « Donc pas de terrain de stage, pas de Dr Junior ». En effet cette 4e année devra se faire encadrer par des MSU dans des terrains agréés dans des lieux où exercent un ou plusieurs généralistes. « Les contraintes géographiques pèsent donc sur les maîtres de stages et les terrains de stage, pas sur les étudiants », précise le Pr Saint-Lary.
Rapport définitif en janvier
La question du nombre de MSU et de leur répartition est donc, elle aussi, centrale. Selon le dernier décompte du CNGE, présenté ce jeudi, les MSU sont actuellement 12 377 en 2022, soit plus de 20 % du corps professionnel des généralistes en activité. « Il faut en prendre soin, a insisté le Pr Saint-Lary. Mais cela ne doit pas occulter les inquiétudes réelles et l’augmentation significative et rapide nécessaire dans les trois ans à venir ».
Il a donc appelé à une sanctuarisation de la formation des MSU, à une valorisation de leur statut avec par exemple une indemnité spécifique quand ils s’investissent dans l’encadrement de thèses.
« Le succès de la réforme est aussi lié à l’augmentation très significative du nombre d’enseignants en médecine générale et à l’attractivité du statut en ce qui concerne les associés », a-t-il ajouté. Il a aussi demandé des moyens supplémentaires à l’endroit des scolarités avec des gestionnaires de scolarité dédiés dans chaque UFR.
« L’ensemble des consultations menées nous enjoint à vous proposer de mettre en place une 4e année de DES centrée sur les besoins d’apprentissage des étudiants, loin des fantasmes coercitifs inopérants », a conclu le Pr Saint-Lary qui a annoncé que la mission rendrait son rapport définif avant la fin du mois de janvier.
Formation MSU en hors quota pour 2023
La mission a donc posé des premières propositions claires à l’attention du ministre de la Santé, et l’intervention qui s’est achevée par une standing ovation de l’amphithéâtre du Grand Palais de Lille a mis un peu plus la pression au ministre de la Santé.
Celui-ci ne s’y est d’ailleurs pas trompé et il a commencé son intervention en plaisantant sur la difficulté à prendre la parole après l’intervention du Pr Saint-Lary. Et s’il n’est pas forcément entré dans tous les détails des demandes concernant cette quatrième année, globalement il a donné des gages sur plusieurs points.
« Vous n’êtes pas responsables de la situation actuelle de notre système de santé », a-t-il lancé à la salle, récoltant ses applaudissements.
Sur la phase de consolidation, il a rappelé que la philosophie était de renforcer la formation des futurs généralistes. « C’est l’enjeu et je le répète car cela a souvent été déformé ».
Car, même si sur l’accès aux soins, il sait que « les attentes de la population sont immenses », sur la coercition il a redit sa conviction personnelle. « Vous dites qu’aucune structure auditionnée n’y est favorable. Ça tombe bien, moi non plus. J’y suis opposé parce que je pense, je crois, je sais que l’obligation ne fonctionne pas dans la durée ».
Il a donc redit que les stages se feront en priorité mais sans obligation dans les zones sous-denses, en ambulatoire, sauf dérogation et auprès de MSU. « Nous allons continuer à augmenter ce nombre de maître de stages, c’est la condition pour que cette quatrième année soit une réussite », a expliqué le ministre.
En ce sens il a donc annoncé que pour 2023 toutes les formations MSU validées par le CNGE resteraient en hors quota, y compris les formations continues.
Les textes en juillet
Autre engagement du ministre, celui de faire paraître les textes réglementaires au plus tard en juillet 2023.
« Je m’y engage pour que les étudiants puissent faire leur choix de spécialité en toute connaissance de cause ».
Sur la question des effectifs enseignants en médecine générale, c’est sa collègue Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur qui a donné des premières réponses. Absente physiquement au congrès, elle avait chargé François Braun de lire un message en son nom.
« Pour réussir la réforme, il faudra des renforts en moyens humains, en enseignants titulaires et associés, en maîtres de stages universitaires, en CCU (chefs de clinique des universités) de médecine générale. Mon ministère est tout à fait disposé à travailler à un plan de médecine générale d’accompagnement de cette réforme », a transmis la ministre.
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