C'est un nouveau volet dans l'affaire du Levothyrox. « Le président de Merck en France a été entendu » mardi au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille, a annoncé la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck dans un communiqué mercredi 19 octobre. À l’issue de cette audition, « la juge d'instruction a décidé de mettre la société Merck en examen pour tromperie aggravée », dans le volet pénal du dossier du changement de formule de ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde.
Cette décision est liée aux « modalités d'information mises en place au moment de la transition de l'ancienne à la nouvelle formule en 2017 », pour ce médicament prescrit contre l'hypothyroïdie, ajoute l'entreprise. C'est une étape supplémentaire dans le feuilleton judiciaire opposant le laboratoire à de nombreux patients.
Une mise en examen attendue
Cette annonce a été saluée par Marie-Odile Bertella-Geffroy, avocate représentant quelque 3 000 patients du Levothyrox. « Cela fait plusieurs années que l'information judiciaire est ouverte et que l'on attendait cette mise en examen. On se disait que cela n'arriverait jamais. Mes clients n'y croyaient plus. Enfin cela bouge », a réagi mercredi cette ancienne juge d'instruction au pôle santé du tribunal de Paris.
Le laboratoire indique de son côté vouloir « apporter toute précision nécessaire afin de faire établir qu'aucune infraction pénale, de quelque nature que ce soit, n'a été commise. » Merck ajoute aussi dans son communiqué que cette mise en examen « ne concerne en aucun cas la qualité de la nouvelle formule du Levothyrox ».
Défaut de vigilance ?
Il s'agit d'un des nombreux volets de cette affaire. En juin 2019, l'ANSM, l'Agence nationale française contrôlant la sécurité des médicaments, avait mené une étude sur plus de deux millions de patients et conclu que le passage à la nouvelle formule du Levothyrox n'avait pas engendré de « problèmes de santé graves ».
Cette agence est aujourd'hui visée par une action collective de quelque 1 100 plaignants pour « défaut de vigilance » et « défaut d'anticipation », une action lancée en septembre 2021 devant le tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis).
Dans un autre volet, au civil, la Cour de cassation a rejeté en mars cette année le pourvoi de Merck, qui avait été condamné en 2020 à indemniser plus de 3 300 utilisateurs ayant souffert d'effets secondaires à la suite du changement de formule, avec le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients, pour rendre sa composition plus stable.
Des effets secondaires
Or, des patients se sont plaints rapidement de nombreux effets secondaires : crampes, maux de tête, vertiges ou perte de cheveux. Au point qu'une pétition pour réclamer le retour de l'ancienne formule a recueilli plus de 170 000 signatures.
Dans son arrêt, la plus haute juridiction française a estimé que « lorsque la composition d'un médicament change et que cette évolution de formule n'est pas signalée explicitement dans la notice, le fabriquant et l'exploitant peuvent se voir reprocher un défaut d'information », pouvant « causer un préjudice moral ».
En France, quelque 2,5 millions de patients utilisent quotidiennement la nouvelle formule du Levothyrox, selon Merck, et moins de 100 000 patients sont aujourd'hui traités avec l'ancienne formule importée en France depuis fin 2017 sous le nom d'Euthyrox.
(Avec AFP)
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