Élections aux URPS : « fiers », « confortés », « déçus » ou « amers », les syndicats médicaux font leur introspection et ciblent… le flop de la participation

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Publié le 08/04/2021
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URPS

Après l'annonce des résultats aux élections URPS par le ministère de la Santé, les syndicats de médecins libéraux ont tiré ce jeudi les premières conclusions de ce scrutin.

Franche amertume pour les uns, satisfaction pour les autres, tous regrettent le taux de participation exceptionnellement bas (22,6 % dans les deux collèges confondus contre 39,9 % en 2015) – une abstention qui s'explique par la crise sanitaire, les modalités électroniques de vote et le désintérêt pour cette campagne. 

Satisfaction tempérée à la CSMF

Toujours première en nombre total de sièges (161 médecins élus dans les deux collèges), la CSMF perd des voix par rapport à 2015 – passant de 20,25 % à 17,31 % chez les généralistes et de 31,6 % à 22,3 % chez les spécialistes. « Nous restons le premier syndicat en nombre d'élus et en nombre de voix, se réjouit tout de même le Dr Jean-Paul Ortiz, son président. C'est une satisfaction mais elle est tempérée par une participation en très forte baisse – ce mode de scrutin numérique n'était peut-être pas le bon – et un éclatement des voix. » Pour le néphrologue président de la Conf', la dispersion syndicale n'a pas incité les médecins à se mobiliser. « Il va falloir avoir une réflexion à ce sujet car nous sommes faibles à être aussi nombreux devant le gouvernement », prévient-il.

MG France fier de son ancrage, stratégie validée chez Avenir Spé-Le BLOC

Le repli de la centrale confédérale s'opère d'abord au profit de deux syndicats monocatégoriels, qui prennent le contrôle des deux collèges.

Chez les généralistes d'abord, MG France conserve son leadership et fait même mieux qu'en 2015 (36,58 %, contre 31,29 %). Une fierté pour son leader, le Dr Jacques Battistoni. « Ce score témoigne de notre implantation dans toutes les régions et du travail accompli auprès des médecins, réagit le généraliste normand. Il conforte notre position de revendication et de construction avec les pouvoirs publics. » Pour le président de MG France, ces élections « confortent surtout les syndicats ayant choisi la défense monocatégorielle », malgré l'arrivée de « syndicats comme l'UFML-S, qui veulent renverser la table ».

Côté spécialistes, c'est l'union Avenir Spé-Le BLOC qui s'impose nettement (39,30 %). « L'objectif est atteint, malgré une faible participation due à la crise sanitaire et au changement des modalités de vote. Pour autant nous sommes heureux de devenir le premier syndicat chez les spécialistes, cela conforte la stratégie initiée il y a dix ans avec la création du BLOC », souligne le Dr Philippe Cuq, son coprésident. « Toutes les centrales polycatégorielles ont énormément perdu, analyse son partenaire, le Dr Patrick Gasser, à la tête d'Avenir Spé. Cet excellent score consolide notre réflexion, et j'appelle toutes les verticalités à rallier notre union syndicale car c'est l'évolution logique des choses. »

L'UFML gagne sa représentativité, la FMF et le SML font grise mine

Nouvel entrant, l'UFML-Syndicat, creuse son trou dans les deux collèges à un niveau très similaire (17 % des voix généralistes et 16,7 % des suffrages spécialistes) et affiche son contentement tout en pointant la participation « catastrophique pour notre démocratie ». « Devenir le deuxième syndicat polycatégoriel est satisfaisant pour une première fois. On gagne la représentativité, c'est une bonne chose car cela va nous permettre de participer aux négociations conventionnelles et de porter nos idées. Nous voulons être l'étincelle pour dire que la récréation est terminée », ambitionne le Dr Jérôme Marty, son président. Le généraliste de Fronton appelle à « changer l'image du syndicalisme, qui est aujourd'hui moisi ».

Perdants de ce scrutin, la FMF et le SML – deux syndicats polycatégoriels historiques – font leur introspection. « C'est une défaite, on est déçus mais on l'assume, indique le Dr Philippe Vermesch, président du SML, dont le score dans le collège généraliste tombe de 16,49 % à 9,46 %. « Ce résultat me reste en travers de la gorge car si la représentativité est fixée à 10 %, il nous manque 0,5 point. Mais nous avons fait une belle campagne et on a donné tout ce qu'on pouvait. » Pour le stomatologue du Var, le taux de participation est surtout la preuve que les URPS « n'ont pas fait leur boulot ». « Si elles avaient prouvé leur utilité, les médecins auraient plus voté. »

Pour le Dr Corinne Le Sauder, présidente de la FMF, la performance décevante du syndicat (environ 10 points de moins qu'en 2015 dans chaque collège, soit 17 % chez les généralistes et 7,5 % chez les spés), s'explique par la multiplication des syndicats qui a « dilué la donne ». « Beaucoup de nos voix sont passées à l'UFML et à Avenir Spé-Le BLOC », souligne-t-elle. Face à l'émergence de ces deux nouvelles forces syndicales, la présidente de la FMF opère une métaphore… politique. « C'est un peu du macronisme syndical, on vote pour eux au cas où ils changeraient les choses », avance le Dr Le Sauder, prête malgré tout à « faire avancer le Schmilblick et aller de l'avant. C'est bien d'avoir de nouvelles têtes, mais il faut savoir vers quoi on va évoluer. »

Jeunes médecins croit en l'avenir

Sans surprise enfin, deux syndicats n'auront pas la représentativité pour négocier avec l'Assurance-maladie.

Jeunes Médecins (JM) n'obtient qu'un seul siège chez les spécialistes en Nouvelle-Aquitaine (sur deux listes en tout), mais ne montre aucun signe de découragement, au contraire. « C'est une première historique », s'exclame Emanuel Loeb, son président, un brin bravache. « Jeunes Médecins est désormais le seul syndicat à avoir des élus à la fois chez les hospitaliers et les libéraux. C'est le début d'un mouvement de fond pour sortir du clivage médecine hospitalière/médecine de ville », veut-il croire, confiant sur l'avenir de sa structure qui avait eu des difficultés à faire partie du scrutin. Présente dans deux régions également, l'Union collégiale obtient de son côté 8 sièges (2 en Île-de-France et 6 en PACA) et moins de 2 % des suffrages exprimés. 


Source : lequotidiendumedecin.fr