Si vous décidez de quitter le BNC pour passer à l'Impôt sur les sociétés (IS), comme c'est désormais possible, encore faut-il le faire dans les temps et intégrer alors de nouvelles règles fiscales et en matière de prélèvement personnel.
Dans quels délais pouvez-vous prendre l’option IS ?
● Si vous êtes déjà en activité libérale et concerné par le passage à l’IS en 2023 (voir Le QdM n° 9956), vous ne pourrez opter pour l’IS auprès de votre SIE (service des impôts des entreprises) qu’entre le 01/01 et le 31/03/2023 afin de soumettre le résultat fiscal (devenu un BIC) de votre activité professionnelle d’EI (entreprise individuelle) à l’IS au titre de l’année civile 2023 entière. Et pas avant ni après ce premier trimestre 2023, auquel cas votre entier résultat fiscal de 2023 restera soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) en tant que BNC. Cela est dû à l’assimilation de votre EI à une EURL sans les lourdeurs administratives d’un passage en société, qui est, lui, possible en cours d’année civile.
Précision : si vous êtes concerné par l’indication de passer à l’IS en 2023 alors que votre régime déclaratif fiscal actuel (2022) est le Micro-BNC, vous devrez signifier à votre SIE votre passage en régime réel au 01/01/2023 tout en optant pour l’IS dans les mêmes délais que ci-dessus. Le régime Micro-BNC n’est pas admis en EI/IS, et vous ne pouvez pas changer de régime déclaratif en cours d’année 2022.
● Si vous venez de débuter votre activité libérale ou la débuterez dans les semaines qui viennent, vous pouvez opter pour l’IS au titre de l’année 2022 avant la fin du 3e mois de votre nouvelle activité libérale. Notre avis : cette indication concerne quelques rarissimes cas.
Quelles modifications de votre comptabilité avec l'IS ?
En prenant l’option pour l’IS (par exemple au 01/01/2023), votre assimilation à une EURL modifie radicalement votre comptabilité. Finie le BNC de trésorerie en mode « recettes/dépenses », vous passez en comptabilité commerciale, dite d’engagement, avec toutes les obligations comptables afférentes. Le recours à un cabinet comptable s’imposera et vous n’aurez plus aucune obligation ni relation avec votre AGA au titre de 2023. Concurremment, votre dernier résultat BNC 2022 au printemps 2023 sera à déclarer en mode non plus « recettes/dépenses » mais en mode « créances/dettes » (cf. QdM n° 9914 du 08/10/21).
Et quelles modifications de vos habitudes ?
Notre conseil anticipatif : si vous optez pour l’IS, faites-vous préciser par votre expert-comptable vos nouvelles pratiques en matière de prélèvements personnels à partir de votre trésorerie professionnelle. Car en EI/IS, tout change aussi sur ce plan.
● En comptabilité BNC, tout ce que vous prélevez est un retrait de l’exploitant, par essence non déductible. Que vous préleviez plus que votre trésorerie ne vous le permet, ou à l’inverse beaucoup moins, le résultat fiscal de votre activité libérale (votre BNC) est intégralement soumis à l’IRPP. Ainsi, « piquer dans la caisse » n’est pas frauduleux dès lors que tous les montants sont inscrits en comptabilité en colonne non déductible et que vous endossez l’entière responsabilité de vos dettes professionnelles.
● Tandis qu’en EI/IS, la règle est toute différente : votre EI étant assimilée à une EURL (déclinaison individuelle de la SARL), vous n’avez plus le droit de « piquer dans la caisse » car il s’agit, par assimilation, de biens sociaux à responsabilité limitée. Vos seuls prélèvements autorisés en cours d’exercice sont, outre ceux issus d’une distribution de dividendes précédemment autorisée, ceux de votre rémunération de travailleur indépendant (RTI).
Rappel : votre RTI est autodéterminée dans le cadre d’une limite annuelle non-anormale, la rendant alors déductible du résultat de votre EI/IS. Si vous prélevez plus que votre RTI accordée, l’excédent ainsi prélevé relèverait de la catégorie des dividendes, non déductibles du résultat de l’EI/IS et soumis à l’impôt et aux cotisations sociales obligatoires selon les règles de notre précédent article (QdM n° 9955). Attention alors : si cela devait être le cas, cela voudrait dire que votre EI/IS n’est ni pilotée, ni gérée ; « piquer dans votre caisse » devient alors une infraction sanctionnable, un délit potentiel ! D’où de grandes désillusions à l’arrivée quant à l’optimisation à laquelle vous auriez rêvée… sans parler du risque de contrôle fiscal face à une rémunération anormale (au sens fiscal) générant alors un déficit fautif de votre activité EI/IS. En sus, les cotisations sociales qui seraient exigées sur la quote-part d’une rémunération jugée anormale ne constitueraient pas des dépenses déductibles…
Mention « EI » obligatoire anecdotique
Les Urssaf et de nombreuses AGA ont communiqué sur l’obligation imposée depuis le 15/05/2022 par le décret 2022-725 à tout professionnel libéral de faire figurer la mention « EI » après son nom sur ses documents et correspondances à usage professionnel. Notre avis : le décret l’impose en effet, mais le sujet est tout simplement anecdotique : aucune sanction n’est applicable en cas d’oubli. Inutile de vous inquiéter ou vous précipiter donc. L’essentiel de ce décret n’est pas là, il est détaillé dans nos deux articles des 23 et 30/09/22.
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