« Il est clair que le tabagisme reste la principale cause de BPCO. Mais aujourd'hui, nous avons de plus en plus de données pour dire que cette maladie a aussi des racines dans l'enfance et peut avoir des liens avec une situation de prématurité à la naissance », indique la Dr Maeva Zysman, pneumologue à l'hôpital Henri Mondor de Créteil, en soulignant l'intérêt d'accorder une plus grande attention aux déterminants précoces de la BPCO. « Et c'est une bonne chose que ce sujet puisse être évoqué lors de la plénière du CPLF », ajoute-t-elle.
Les patients qui développent une BPCO restent en très grande majorité des personnes ayant derrière elles un long passé de tabagisme. « Mais on sait qu'il se joue aussi des choses durant l'enfance et même avant la naissance. Les enfants ayant été exposés in utero au tabagisme de leur mère ont ainsi plus de risque de développer à l'âge adulte des troubles ventilatoires obstructifs persistants. Et ce risque augmente si ces enfants se mettent ensuite eux-mêmes à fumer à l'adolescence ou à l'âge adulte », indique la Dr Zysman, en ajoutant que le risque de BPCO est également accru pour les enfants ou les adolescents qui présentent un asthme mal contrôlé. « Il est donc important de faire très attention à ces jeunes patients pour limiter le risque de séquelles ».
Mais il faut aussi prendre en compte le cas des enfants nés prématurés. « Ces dernières années, de gros progrès ont eu lieu dans le domaine de la réanimation néonatale. On arrive aujourd'hui à faire vivre des enfants qui, auparavant, décédaient. Mais du coup, on voit de plus en plus d'enfants avec des complications pulmonaires diverses. Et on voit désormais des patients adultes avec un poumon « dystrophique » et des lésions pouvant faire penser à de l'emphysème. Le pneumologue doit être conscient que cet état n'est peut-être pas uniquement lié à une agression du tabac ou à la pollution atmosphérique mais à un défaut de développement consécutif à une naissance prématurée », indique la Dr Zysman, en soulignant la nécessité d'inviter les patients ayant eu une naissance prématurée à ne pas hésiter à consulter en cas de symptômes respiratoires.
La Dr Zysman souligne que, selon des données venues d'Angleterre, moins de 10 % des pneumologues se posent la question des déterminants précoces de la BPCO. « Les pneumo-pédiatres y pensent davantage, bien sûr, mais il faut continuer à faire de la sensibilisation. Face à un patient présentant un tableau typique de BPCO, il n'est pas obligatoire de prêter attention à ce qui s'est passé dans l'enfance, quoique. Mais cela devient nécessaire face à des patients présentant une obstruction significative dont on n'arrive pas à expliquer l'origine », indique la Dr Zysman en rappelant que la journée mondiale de la BPCO, en novembre dernier, était « organisée sur le thème : jamais trop tôt, jamais trop tard ».
Entretien avec la Dr Maeva Zysman, pneumologue à l’hôpital Henri Mondor (Créteil). Membre de l’unité 955 de l’Inserm, elle prépare actuellement une thèse de sciences sur ce sujet
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