LA GOUTTE résulte d’une hyperuricémie chronique supérieure à 420 µmol/l (70 mg/l), seuil de saturation du plasma en urate de sodium ; les cristaux d’urate de sodium sont responsables d’accès articulaires aigus, et avec le temps, de la constitution de dépôts tissulaires (intra-articulaires, périarticulaires, osseux, cutanés), les tophus goutteux. Les arthropathies chroniques sont la conséquence de ces dépôts. Les accès goutteux débutent habituellement au membre inférieur, en particulier au pied, arthrite de la métatarso-phalangienne du gros orteil (podagre), de la cheville, du genou et peuvent concerner, au cours de l’évolution, les membres supérieurs (mains, coudes). En l’absence de traitement, la sédation est spontanée en une à deux semaines et s’accompagne d’une desquamation cutanée caractéristique. Des polyarthrites goutteuses sont possibles. Les articulations sont normales entre les crises, au moins au début. En revanche, en l’absence de traitement, apparaissent des arthropathies chroniques, responsables de douleurs mécaniques, des tophus autour des articulations atteintes, mais aussi dans quelques sites électifs comme le pavillon de l’oreille, la région olécranienne, les tendons d’Achille, les articulations inter-phalangiennes distales.
Diagnostic.
Devant un accès aigu, le diagnostic de la goutte repose sur le terrain (homme avec syndrome métabolique et /ou antécédents cardio-vasculaires, ayant une consommation excessive d’alcool, un traitement par diurétiques au long cours), l’anamnèse (accès antérieurs, antécédent de lithiase urique, antécédents familiaux), les caractéristiques des accès (monoarthrite à début brutal, acmé des signes inflammatoires et des douleurs atteinte en 24 heures, localisation au gros orteil), la présence de tophus. La mise en évidence de cristaux d’urate de sodium dans le liquide articulaire, si elle est possible, confirme le diagnostic. L’uricémie est le plus souvent trouvée supérieure à 420 µmol/l mais elle peut être normale lors des accès (dosage à répéter à 3 ou 4 semaines de l’accès), ou à l’inverse, peut être trouvée élevée sans qu’il s’agisse d’un accès goutteux : l’hyperuricémie asymptomatique est en effet fréquente.
Bilan.
Le dosage de la créatininémie avec clairance MDRD identifie une insuffisance rénale, une NFS permet d’éliminer une maladie hématologique, et le dosage de la glycémie, des paramètres lipidiques, et éventuellement des transaminases, permet d’étayer la réalité d’un syndrome métabolique. L’uricurie des 24 heures ou le rapport uricurie/créatininurie d’un échantillon matinal d’urines permet devant une histoire familiale de goutte précoce, une goutte débutant avant 25 ans, de déceler le caractère de faible excréteur. Le seul examen d’imagerie utile en phase débutante, en cas de doute diagnostique, est l’échographie articulaire.
Traitement prophylactique.
Le traitement chronique de la goutte se justifie à partir de la deuxième crise, a fortiori si les accès sont rapprochés. Le traitement hypo-uricémiant de première intention est l’allopurinol. En deuxième intention, en cas d’allergie ou d’insuffisance rénale limitant la posologie d’allopurinol, le choix se porte sur le febuxostat (Adénuric), autre inhibiteur de la xanthine-oxydase, ou sur le probénécide (Bénémide), uricosurique en tenant compte de leurs contre-indications respectives. Ces traitements prophylactiques hypouricémiants doivent s’assortir de la prévention des accès goutteux pendant les 6 premiers mois, par la colchicine à 1 mg/j ou par de petites doses d’AINS. Le mécanisme et la réalité de l’augmentation du risque de crise de goutte, du fait de la mobilisation des cristaux d’urates, dans les premiers mois du traitement doivent être bien expliqués au patient ainsi que la conduite à tenir en cas de crise, malgré la prise quotidienne de colchicine*.
Observance.
Une des limites de la prise en charge de la maladie goutteuse est la non-observance du traitement prophylactique. D’où l’importance de l’information sur les modalités et l’intérêt du traitement, sur la prise en charge des facteurs de risque associés, en particulier la consommation excessive d’alcool. Les modifications de comportement font en effet partie des indicateurs validés de qualité du traitement de la goutte. Le dosage régulier de l’uricémie constitue un excellent témoin de cette bonne observance avec l’objectif d’atteindre une uricémie inférieure à 60 mg /l.
*L’Afssaps a récemment rappelé (cf « le Quotidien » du 29 septembre 2011) les principales précautions d’emploi de la colchicine en particulier ses interactions médicamenteuses et ses précautions d’emploi chez les sujets âgés, insuffisants rénaux ou hépatiques. La clairance de la créatinine doit être évaluée avant l’instauration du traitement. Il faut surveiller la numération formule sanguine (NFS), les plaquettes et la fonction rénale lors du premier mois de traitement ou lors de l’introduction de médicaments à risque d’interaction chez ces sujets à risque.
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