L'arrivée des systèmes de perfusion d’insuline automatisée en boucle fermée, souvent qualifiés de « pancréas artificiel », nécessite un accompagnement spécifique du patient qui en bénéficiera. « L'éducation thérapeutique sera proche de celle mise en place pour les patients sous pompe à insuline, mais les patients devront également bien intégrer les avantages et les limites de l'algorithme », indique au « Quotidien » le Pr Éric Renard, chef du service d'endocrinologie et de diabétologie du CHU de Montpellier.
C'est cet algorithme qui fait le caractère innovant du « pancréas artificiel » et qui permet d'éviter les hyperglycémies et les hypoglycémies de manière automatisée. Les systèmes hybrides sont constitués de trois éléments : pompe à insuline, capteur de glycémie et algorithme. Ce dernier est intégré dans la pompe (Minimed 670G de Medtronic et Control-IQ de Tandem) ou dans un smartphone dédié (DBLG1 de Diabeloop).
Bonne connaissance du système
Pour un bénéfice optimal, une bonne connaissance de l'ensemble du système et de la gestion du diabète est essentielle. En pratique, l'éducation thérapeutique se déroulera pas à pas avec l'équipe de diabétologie, sur 2 à 4 semaines.
Dans un premier temps, le système pompe-capteur est présenté au patient sans l'algorithme. « Dans le cadre des essais, les patients avaient environ 2 semaines pour se familiariser avec ce système de manière à être capables de gérer les changements de cathéter et de comprendre notamment les données du capteur, raconte le Pr Renard. Cela permet aussi de connaître la quantité d'insuline nécessaire pour 24 heures, paramètre essentiel à intégrer dans l'algorithme ». Pour les patients déjà sous pompe et capteur, le passage au système automatisé sera plus rapide que pour les patients qui ont recours aux multi-injections et/ou n’utilisent pas de capteurs.
Une fois que le fonctionnement manuel est maîtrisé, vient la phase d'explication de l'algorithme, qui va pouvoir être activé. L'algorithme est programmé pour réduire le débit d'insuline en cas de risque prédit d'hypoglycémie et pour l'augmenter en cas de montée glycémique. « Les algorithmes ne sont pas exactement les mêmes en fonction des modèles. Par exemple, le système Minimed 670G est le seul à ne pas faire de "bolus" de correction », précise le diabétologue.
Autre spécificité du Minimed 670G : « le dispositif repasse rapidement en manuel lorsque la délivrance d'insuline dépasse certains seuils de sécurité, note le Pr Renard. Il faut bien l'expliquer aux patients, car aux États-Unis, de nombreux patients s'en sont plaints et ont abandonné le système ».
Un système pas 100 % automatisé
L'éducation thérapeutique permet aussi d'expliquer au patient qu'il ne sera pas totalement inactif avec un système hybride, contrairement à ce que le terme « pancréas artificiel » sous-entend. « Le système peut émettre un signal d'alarme et repasser automatiquement en manuel en raison d'un problème de cathéter, de capteur… Le patient devra alors reprendre le système en mains et régler le problème qui interrompt l’automatisation », prévient le Pr Renard.
Le patient devra également être actif au moment des repas ou en cas d'activité physique. « Dans ces modèles hybrides, le patient doit annoncer la prise alimentaire ou l’activité physique et valider la quantité d'insuline à délivrer proposée par le calculateur de bolus ou changer la cible glycémique respectivement », détaille le diabétologue, ajoutant que « le patient doit donc savoir compter les glucides des aliments ».
Les systèmes hybrides sont par ailleurs des dispositifs relativement encombrants. « Pour les patients qui les ont testés, la visibilité de ces appareils externes est la réticence principale à la poursuite de leur utilisation au long cours », souligne le Pr Renard. Le patient doit se déconnecter et passer en manuel en cas de baignade ou peut préférer se libérer du dispositif lors de relations sexuelles par exemple.
En revanche, la diminution de la charge mentale est le point fort de ces systèmes hybrides : « c'est l'un des effets les plus positifs rapportés par les patients et par les parents d'enfants diabétiques, qui ressentent un soulagement ».
Comme pour toutes les pompes, une astreinte de sécurité doit permettre de répondre aux questions techniques des patients 24 heures sur 24. Diabeloop propose également un service de vigilance par télémédecine avec une équipe d'infirmiers dédiés qui surveillent à distance les données glycémiques.
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