La médiatrice européenne Emily O'Reilly a jugé « en partie recevable », la plainte déposée contre l'Agence européenne du médicament (EMA) par les chercheurs du centre Nordic Cochrane et plusieurs autres médecins, dont l'épidémiologiste Tom Jefferson (université d'Oxford et également collaborateur du réseau Cochrane). La plainte concerne la manière dont l'agence a examiné le rapport bénéfice risque des vaccins anti-HPV et est également soutenue par des associations comme Transparency International, l'ONG espagnole No gracias et l'organisation britannique HealthWatch.
Les auteurs ne prétendent pas contester le bien-fondé de la vaccination. Seule la rigueur du travail de l'EMA est mise en cause.
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Depuis 2015, plusieurs signalements ont été faits auprès de l'EMA : syndrome de fatigue chronique, syndrome douloureux et tachycardie orthostatique posturale.
Le comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l'EMA avait conclu en novembre 2015 à une absence de lien entre les vaccins Gardasil et Cervarix, et ces syndromes rares. Deux mois auparavant, une très robuste étude française excluait le risque de maladies auto-immunes, mais pointait une association entre la vaccination et un faible risque de syndrome de Guillain-Barré.
Dans leur plainte, déposée le 10 octobre, les auteurs s'appuient sur un rapport intermédiaire confidentiel fournit par l'agence dont la lecture jetterait un doute sur les conclusions très affirmatives de novembre 2015. Compte tenu de « la mauvaise qualité » des études en sa possession, l'EMA « n'est pas en mesure d'apporter l'assurance de l'innocuité des vaccins contre le HPV », affirment les plaignants, contrairement à ce qu'a affirmé l'agence dans « un communiqué qui aurait aussi bien pu être écrit par un responsable des relations presse d'un laboratoire pharmaceutique ».
Le directeur de l'EMA mis en cause
En outre, le secret entretenu autour des délibérations de l'EMA étonne les plaignants du réseau Cochrane, qui reprochent également les liens d'intérêt de plusieurs membres de l'EMA, à commencer par son directeur exécutif, le Pr Guido Rasi. Ce dernier aurait fait entrer à l'EMA plusieurs membres de la société pharmaceutique Tau Sigma, avec laquelle il a collaboré à plusieurs reprises. Ces accusations ont été remises en question dans une lettre adressée par un directeur exécutif adjoint Noël Wathion, qui y précise que, si le nom du Pr Rasi figure sur plusieurs brevets de médicament, il y était mentionné comme inventeur et non comme détenteurs des droits. À ce titre, il n'avait pas à mentionner ces informations dans sa déclaration d'intérêts.
Concernant les autres aspects de la pleinte, l'EMA a estimé dans un autre courrier qu'il s'agissait surtout d'erreurs d'interprétations. C'est suite à ces réponses qu'ils qualifient en grande partie de « fausses ou trompeuses », les membres du réseau Cochrane ont pris la décision de déposer une plainte auprès de la médiatrice Emily O'reilly.
Deux affaires instruites par la médiatrice
Contacté par « Le Quotidien », le bureau de la médiatrice a précisé que cette dernière « n'avait pas encore pris de décision » quant à la suite à donner à cette plainte, « des discussions vont vraisemblablement s'engager avec l'EMA », qui pourrait déboucher sur une remise à plat des procédures de l'agence. Deux affaires vont être instruites par les services de la médiatrice, 1475/2016/JAS en ce qui concerne la procédure mise en place par l'EMA, and 1606/2016/JAS centrée sur les conflits d'intérêts. Il s'agit du même processus qui avait été initié suite à une autre plainte émanant du réseau Cochrane concernant le manque de bonne volonté dans l'ouverture de l'accès aux données cliniques.
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