En 2020, le projet Targeting Aging with Metformin (TAME) démarrera (1). L’hypothèse de départ : la metformine, une molécule anti-diabétique prescrite depuis plus de 70 ans, peu coûteuse et avec un profil de tolérance bien connu permettrait d’augmenter l’espérance de vie. Cette étude a été acceptée en 2016 par l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) et est coordonnée par le Dr Nir Barzilai, directeur de l’institut de recherche sur le vieillissement de la faculté de médecine Albert Einstein aux États-Unis. Elle sera composée de 3000 patients non-diabétiques âgés de 65 à 79 ans considérés « en bonne santé », avec comme critère principal d’évaluation la survenue d’une maladie associée à l’âge telle que l’infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral, une insuffisance cardiaque, un cancer, une démence et le décès. Le résultat attendu : la metformine permettrait d’augmenter de 22,5 % le temps jusqu’à l'apparition du premier évènement.
Le ciblage des cellules sénescentes
Pourquoi utiliser une molécule destinée à combattre le diabète pour tenter de lutter contre le vieillissement ? Tout a commencé de façon fortuite par les conclusions surprenantes de l’étude de Christian A. Bannister et al. (Institut Cochrane de soins primaires et de santé publique, université de Cardiff, Royaume-Uni) publiée au Royaume-Uni en 2014 (2).
Après avoir compilé des centaines de milliers de données sur 180 000 patients traités par la metformine, cette étude a observé que non seulement la survie de ces patients était supérieure à celle des diabétiques traités par d’autres anti-diabétiques mais surtout qu’elle était supérieure à celle de deux groupes appariés constitués de non-diabétiques.
Le mécanisme d’action de cette molécule n’est pas encore connu mais il semblerait qu’elle cible les cellules sénescentes, c’est-à-dire en arrêt de division (processus normal lié à l’âge). Elle les empêche de fabriquer des produits de dégradation qui finissent par altérer le fonctionnement normal des cellules voisines. Elle permettrait aussi d’augmenter la production de la protéine kinase A (PKA) et de la protéine mTOR qui décroîssent progressivement avec l’âge.
Bien qu’il n’y ait pas encore de consensus dans la communauté des chercheurs, le projet TAME lance le challenge de la recherche clinique dans le domaine du vieillissement. En effet, les nombreuses études chez la souris, certes encourageantes, ne sont pas si faciles à reproduire chez l’homme. La réelle démonstration d’une molécule permettant de ralentir le vieillissement avec des résultats statistiquement significatifs demanderait des études très coûteuses, de très grande ampleur, dans la mesure où les patients inclus seront par principe en bonne santé. Ce n’est donc plus une maladie qui est ciblée mais le vieillissement lui-même.
Même si la FDA ne le reconnaît pas encore officiellement, l’objectif est clairement de « soigner » le vieillissement. Une telle perspective dans le futur imposera de revisiter entièrement nos concepts.
(1) Barzilai N, et al. Cell Metab.; doi: 10.1016 / j.cmet.2016.05.011, 2016. ( 2) Bannister CA, et al. Diabète Obes Metab.; doi: 10.1111 / dom.12354, 2014.
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