Une maladie aux conséquences lourdes

L’objectif numéro un dans l’arthrose est de réduire la douleur

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Publié le 16/10/2020

Maladie rhumatologique souvent banalisée chez les sujets âgés, l’arthrose est pourtant lourde de conséquences et a d’ailleurs été reconnue en 2018 comme une maladie sévère par la Food and drug administration aux États-Unis. La douleur et la gêne fonctionnelle sont une source de réduction des activités, de perte de qualité de vie et in fine de fragilité et de perte d’autonomie.

Les médicaments oraux disponibles ont une efficacité modeste

Les médicaments oraux disponibles ont une efficacité modeste
Crédit photo : Phanie

Le handicap lié à l’arthrose est réel. « 25 % des patients ne peuvent plus réaliser les activités de la vie quotidienne et plus de la moitié ont une gêne majeure, a rapporté le Dr Emmanuel Maheu, rhumatologue à l'hôpital Saint-Antoine (AP-HP). Or, la gêne à la marche est associée à une augmentation de la mortalité cardiovasculaire ».

En matière de prise en charge les besoins sont immenses : globalement, 63 % des patients et 73 % des médecins ne sont pas satisfaits, plus de la moitié des patients sous anti-inflammatoires non stéroïdiens changent de molécule dans les deux mois, dans un tiers des cas par manque d’efficacité et dans 13 % des cas pour effet indésirables.

L’âge souvent absent des recommandations

Les recommandations des sociétés savantes sont-elles adaptées aux sujets âgés ? Le groupe Association gériatrie et rhumatologie (AGRHUM) a questionné la pertinence et les fondements des recommandations internationales chez le sujet très âgé. Dans la plupart, l’âge n’est que peu voire pas mentionné, que ce soit pour les mesures non pharmacologiques ou non pharmacologiques. Les études chez les plus de 70/75 ans font défaut et les mesures préconisées (exercices aérobies et en résistance, exercices aquatiques, perte de poids) ne sont pas adaptées en fonction de l’âge.

Les médicaments oraux disponibles ont globalement une efficacité modeste, avec un effet taille (ET) de 0,18 pour le paracétamol (donc cliniquement non pertinent) et de 0,33 à 0,52 pour les AINS à dose maximale, au prix de risques iatrogéniques importants. Pour les opioïdes, l’ET est plus élevé, de 0,79, mais la iatrogénie est considérable dans cette population. Les injections intra-articulaires d’acide hyaluronique ont un ET de 0,63, bien supérieur aux injections intra-articulaires de placebo (ET de 0,29). Le risque d’arthrite septique est très faible.

Les anti-arthrosiques d’action lente (extrait avocat/soja, chondroïtine sulfate et glucosamine sulfate médicamenteux) ont globalement fait la preuve d’une certaine efficacité à deux à trois mois de recul.

Les prothèses totales, dont les indications se fondent sur la douleur et la gêne fonctionnelle, ne paraissent pas associées à une mortalité plus élevée que chez les plus jeunes, selon deux méta-analyses.

Des espaces d’améliorations

« En pratique, il faut trouver des espaces d’améliorations, même si elles sont mineures », a rapporté le Dr Maheu. L’objectif numéro un est de réduire la douleur, car un patient douloureux ne fera pas d’exercices. Tous les moyens sont bons mais doivent être adaptés au contexte (comorbidités, état cognitif, facteurs de fragilité). Les antalgiques doivent être prescrits de façon progressive et adaptée aux horaires de la douleur. Une grande prudence doit être apportée en cas de recours aux opioïdes. Les AINS sont à administrer préférentiellement en topiques lorsque la localisation s’y prête et un traitement oral ne doit être institué qu’après discussion du rapport bénéfice/risque chez les plus de 80 ans.

Les traitements intra-articulaires, d’acide hyaluronique avant tout, doivent être préférés dans tous les cas quand c’est possible et l’âge ne doit pas faire récuser a priori la pose d’une prothèse totale.

À l’inverse, sont à proscrire les discours négatifs, les idées fausses en matière d'alimentation sources de carences, les prescriptions « défausses », les AINS systématiques et les examens d’imagerie inutiles. Il faut en revanche savoir laisser au patient une certaine marge de manœuvre, et par exemple ne pas forcément les dissuader de faire appel à certains traitements alternatifs (type ?) .

D’après la communication du Dr Emmanuel Maheu, Paris.

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin