Les neurologues des centres experts Mémoire l’attendaient de pied ferme, l’Agence européenne du médicament (EMA) en a décidé autrement. L’autorité sanitaire s'est prononcée ce 25 juillet contre la mise sur le marché dans l'Union européenne du très attendu lécanémab visant à ralentir le déclin cognitif dans la maladie d’Alzheimer au stade débutant.
L’effet observé du traitement commercialisé sous le nom de Leqembi (laboratoires Eisai et Biogen), autorisé aux États-Unis, « ne contrebalance pas le risque d’effets secondaires graves associés au médicament », selon un communiqué du régulateur, qui pointe en particulier le risque de « saignements cérébraux », appelés Aria (pour anomalies radiologiques liées à l’amyloïde).
Depuis des décennies, les chercheurs peinent à réaliser une véritable percée dans la lutte contre la maladie d'Alzheimer, qui touche des dizaines de millions de personnes dans le monde. Le Leqembi avait été autorisé en janvier 2023 par les autorités sanitaires américaines pour les patients n'ayant pas encore atteint un stade avancé de la maladie. Administré par intraveineuse une fois toutes les deux semaines, il est développé par l'entreprise pharmaceutique japonaise Eisai, en partenariat avec l'américaine Biogen. L’anticorps monoclonal lécanémab cible les dépôts de la protéine bêta-amyloïde.
Les Aria, souvent asymptomatiques mais parfois sévères
L'EMA pointe dans son avis négatif « l'apparition fréquente d'anomalies d'imagerie liées à l'amyloïde (...) impliquant un gonflement et des saignements potentiels dans le cerveau », les Aria, dont les risques ne sont pas compensés par des bénéfices cliniques jugés trop minces. « Bien que la plupart des Aria dans l’étude principale n’étaient pas sévères et restaient asymptomatiques, certains patients ont présenté des événements sévères, y compris des hémorragies étendues nécessitant une hospitalisation », lit-on dans le communiqué de l’agence.
Ce frein de l'EMA « sera une déception pour beaucoup », a réagi la Pr Tara Spires-Jones, spécialiste sur la neurodégénérescence à l'université d'Édimbourg. « Mais il y a des raisons de garder espoir. Le lécanémab a montré qu’il était possible de ralentir la progression de la maladie », a-t-elle poursuivi dans un communiqué. « Il nous faut maintenant intensifier nos efforts pour découvrir de nouveaux traitements plus sûrs », a-t-elle ajouté. Mais le dernier en date, le donanémab (laboratoire Lilly), finalement lui aussi autorisé aux États-Unis début juillet, avait connu un faux départ en raison du risque d’Aria.
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