Les différents modulateurs CFTR développés au cours de la dernière décennie restaurent en partie la fonction de cette protéine et ils ont permis d’améliorer significativement l’état de santé de nombreux patients atteints de mucoviscidose.
Leur efficacité clinique, rapide, est aujourd’hui bien démontrée en vie réelle, notamment en termes d’amélioration de la fonction respiratoire, de diminution du nombre d’exacerbations, de statut nutritionnel et de qualité de vie.
Une première étude avait montré que la trithérapie Kaftrio (ivacaftor/tezacaftor/elexacaftor), en association à l’ivacaftor (Kalydeco), permettait d’arrêter l’oxygénothérapie chez 50 % des patients qui en avaient besoin. De même, 30 % n’avaient plus besoin de ventilation non invasive et de 50 % d’alimentation par sonde entérale (1). Une diminution par deux du nombre de transplantations pulmonaires entre 2020 et les deux années précédentes avait été constatée, suggérant que la trithérapie permettait d’améliorer la survie et de retarder le besoin de transplantation.
Pratiquement plus besoin de transplantation
Ces résultats ont été confirmés par un suivi de 12 mois après le début de la trithérapie (2). Parmi les 331 patients atteints de mucoviscidose à un stade avancé, 65 étaient des candidats à la transplantation pulmonaire (17 inscrits pour une transplantation, 48 dont l’inscription était envisagée dans les trois mois). « À la fin de la période de suivi, d’un an, deux patients avaient été transplantés (5 et 11 jours après le début du traitement), deux étaient en attente de transplantation, mais 61 ne répondaient plus aux critères de transplantation. L’amélioration du VEMS à un mois était de 13,4 % ; il est resté stable par la suite. La charge de traitement a considérablement diminué : -86 % d’antibiotiques intraveineux, -59 % d’oxygénothérapie et -62 % de ventilation non invasive », explique la Dr Clémence Martin (Hôpital Cochin, AP-HP), autrice principale de l’étude.
Faire face à un besoin thérapeutique urgent
Saisie par l’association Vaincre la mucoviscidose et le Centre de référence de la mucoviscidose, l’ANSM a établi, en mai 2022, un cadre de prescription compassionnelle, qui permet d’utiliser les médicaments Kaftrio et Kalydeco en association, dans un cadre sécurisé, pour traiter certains patients atteints de mucoviscidose qui ne sont pas couverts par les autorisations de mise sur le marché (AMM) de ces deux médicaments et pour lesquels il existe un besoin thérapeutique urgent.
Les patients concernés sont âgés de 12 ans et plus, ne sont pas porteurs de la mutation F508del et présentent une atteinte respiratoire sévère (VEMS < 40 % de la valeur prédite) ou un risque d’évolution vers une greffe pulmonaire ou un pronostic vital engagé à plus ou moins court terme. « C’est une première dans l’accès à Kaftrio car cela concerne des patients au-delà des 177 mutations rares ayant fait l’objet d’une AMM aux États-Unis et en Grande-Bretagne, souligne la Dr Martin. Nous sommes en train de colliger les données. Le traitement semble être bénéfique dans plus de 50 % des cas. »
Les enfants enfin concernés
Kaftrio a obtenu en janvier 2023 l’extension de l’AMM pour les patients de 6-11 ans porteurs d’au moins une mutation F508del. Son efficacité et sa bonne tolérance chez ces enfants ont été démontrées lors des essais cliniques et évaluées positivement par la HAS. Depuis mars 2022, environ 200 d’entre eux ont déjà pu bénéficier de la trithérapie, via un dispositif d’accès précoce, mais il fallait encore obtenir un accord sur le remboursement pour élargir sa mise à disposition à tous les enfants éligibles.
« Les associations de patients se sont mobilisées et ont multiplié les initiatives auprès des autorités de santé et du laboratoire »
« Les associations de patients se sont mobilisées et ont multiplié les initiatives auprès des autorités de santé et du laboratoire, afin que Kaftrio soit enfin accessible pour tous les enfants âgés de 6 à 11 ans et porteurs d’au moins une mutation F508del », se félicite le Dr Clémence Martin.
En tout, au premier trimestre 2023, ce seront près de 5 000 personnes atteintes de mucoviscidose qui auront accès à la trithérapie.
« Peu à peu, le nombre de patients éligibles aux modulateurs de CFTR augmente. Restent encore, les patients porteurs de mutations de classe 1 (celles qui conduisent à une absence d’expression de la protéine CFTR), sur lesquelles les modulateurs ne peuvent, bien sûr, pas agir. Les recherches se poursuivent », conclut la Dr Martin.
(1) Burgel PR et al. AM J Respir Crit Care Med 2021;204(1):64-73
(2) Martin C et al. J of Cys Fib 2022(21)3:489-96
Article précédent
Nettes améliorations pour le cancer du poumon
Article suivant
L’exposome, une priorité pour la SPLF
Nettes améliorations pour le cancer du poumon
Les indications de Kaftrio s’élargissent
L’exposome, une priorité pour la SPLF
Nouveaux vaccins et Covid long
Mieux détecter la BPCO
Mise à jour FPI
Les SMS du congrès CPLF 2023
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?