Esprit alerte et brillant, Claude Le Pen, Professeur émérite de sciences économiques à l’Université Paris-Dauphine, s’est éteint le 6 avril 2020, à l’âge de 72 ans. Claude Le Pen aura très profondément marqué le champ de l’économie de la santé en France. Chercheur, enseignant et expert, il aura, dès les années 80, participé au débat public et occupé par la suite de multiples fonctions de représentation ou de conseil auprès des décideurs publics (membre du conseil de surveillance de la CNAM, expert auprès de l’Institut de données de santé) et de l’industrie pharmaceutique.
Adepte d'une acception large de la discipline
Directeur du Master d’économie et de gestion de la santé de l’Université de Paris Dauphine pendant trente ans, enseignant passionné et charismatique, il aura formé plusieurs générations d’étudiants devenus acteurs du système de santé. Adepte d’une acception large de l’économie de la santé, il aura dirigé 16 thèses dont certaines auront été défendues par des non-économistes (notamment des médecins ou des pharmaciens).
Claude Le Pen fut également Président du CES (Collège des Économistes de la Santé), la société savante française en économie de la santé, de 2005 à 2012. Figure emblématique du CES, son rôle sera majeur dans le développement et la structuration de la discipline en France mais aussi le rapprochement entre chercheurs et acteurs publics et privés.
Une connaissance fine des acteurs
Ses nombreuses contributions auront éclairé les questions de régulation du système de santé et de financement des soins, d’évaluation des stratégies de santé et d’économie du médicament. En expert avisé de l’économie politique et des institutions, son analyse holistique du système de santé reposait sur une connaissance fine des acteurs, de leurs interactions et de l’histoire de la sécurité sociale. Ses analyses rigoureuses et didactiques étaient ainsi très recherchées par les observateurs du système de santé.
Conscient de la complexité du système de santé et du marché de soins, il mettait les outils de l’analyse économique au service de la santé et de la décision publique. Il rappelait ainsi l’objectif d’efficience des dépenses de santé engagées et des stratégies thérapeutiques sans jamais le limiter à une simple minimisation de coûts d’une part et sans obérer l’exigence d’équité, d’autre part. Il défendait l’exercice libéral de la médecine ou le dynamisme de l’industrie pharmaceutique tout en reconnaissant la nécessité de l’intervention de l’État et d’une économie publique du secteur. Finalement, il interrogeait sans cesse les dynamiques en cours (accès à l’innovation, pratiques médicales, comportement des acteurs, régulation, vieillissement de la population…) lui permettant de mieux appréhender le paradigme émergent.
Jusqu’à sa dernière heure et malgré la maladie qu’il affronta dignement, il aura contribué à la réflexion actuelle sur le système de santé en proie à la gestion de la pandémie de COVID-19. Avec constance, il professait sa foi en la capacité de résilience et en l’excellence du système de santé et louait l’esprit d’innovation des professionnels de santé. Il ressentait, à ce titre, une sincère admiration pour le métier de médecin, en particulier de chirurgien.
Habité d’une énergie intarissable, il répétait combien l’économie de la santé était au cœur de l’évolution des sociétés. La richesse et l’élégance de ses raisonnements, si nécessaires dans cette funeste période, vont manquer à la réflexion collective.
Il lègue, à celles et ceux qui l’ont lu et écouté, le souvenir d’un homme passionné, élégant et d’une grande agilité intellectuelle.
Exergue : Il ressentait une sincère admiration pour le métier de médecin, en particulier de chirurgien.
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