Les médecins donnent de plus en plus de conseils nutritionnels à leurs patients. C’est ce que révèle une enquête Ifop/Lesieur menée sur 100 médecins généralistes en juin 2014. Mais cette enquête a également montré que la motivation était une problématique majeure rencontrée par les médecins généralistes dans la prise en charge de leurs patients. D’où la création d’un comité d’experts pour élaborer des outils répondant à cette problématique.
En effet, la prescription de conseils nutritionnels en médecine générale est très difficile. Les difficultés du médecin relèvent du manque de temps, du contrôle et de l’empathie nécessaires pour faire face aux résistances du patient (alors que naturellement le médecin a envie de convaincre), de l’adoption d’une nouvelle attitude relationnelle où le médecin passe de prescripteur à accompagnateur, et enfin du constat d’un éventuel échec. Mais le changement est bien sûr très difficile pour le patient, forcément ambivalent car il entrevoit ce qu’il va gagner mais aussi ce qu’il va perdre. En outre, le changement se construit sur la durée, il va falloir tenir la route !
La progression des petits pas
Le changement doit procéder d’une démarche active du patient. C’est lui qui fixe les objectifs, c’est le médecin qui l’accompagne et le soutient. Cette posture d’accompagnateur n’est pas si évidente pour le médecin. Plusieurs conditions sont nécessaires pour déclencher la motivation du patient. La première consiste pour le médecin à adopter une attitude centrée sur le patient et non pas sur la prescription. Il doit donner des informations sur les enjeux, les risques et les moyens de changer. La technique comporte trois étapes : l’écoute active (attitude empathique, bienveillante et reformulation neutre voire positive des propos du patient) ; la prise en compte des priorités du patient ; la formulation par le patient de ses objectifs. Une fois la graine semée, la progression va se faire à petits pas... Les objectifs doivent être atteignables, ce qui renforce la confiance en soi du patient.
Deux grands principes permettent donc d’aborder la consultation de nutrition : l’entretien motivationnel qui permet de déclencher l’envie du changement, et la stratégie des petits pas, une fois l’envie déclenchée.
Selon le modèle de Prochaska et Di Clemente, une personne qui adopte un nouveau comportement ou renonce à un comportement à risque à long terme passe par cinq étapes successives : la précontemplation, la contemplation, la préparation, l’action et la maintenance. Lors de la précontemplation, le patient n’envisage pas de changer, il se trouve bien comme il est. Puis il commence à envisager le changement mais reste ambivalent, le changement est envisagé comme possible : c’est la contemplation. Dans la préparation, le patient a décidé de changer et fixe avec le médecin des objectifs réalistes. Dans l’action, le changement est récent mais engagé. Enfin lors de la maintenance, le patient a fait des changements, les premiers bénéfices apparaissent. Pourvu que ça dure... Mais il ne faut pas oublier que la rechute est normale et qu’elle ne ramène pas au stade précontemplatif.
Pour aider les médecins dans leur accompagnement des patients, Lesieur propose un outil : le petit traité de motivation réalisé en partenariat avec l’Unaformec, ainsi que des fiches thématiques à remettre aux patients (prévenir la prise de poids à la ménopause, réduire son tour de taille, manger moins salé, manger moins gras et moins sucré, bien manger en horaires décalés et bien vivre son alimentation en cas de diabète).
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